Le Café littéraire de Béjaïa a accueilli, samedi dernier au Théâtre régional de Béjaïa, l'écrivain et chroniqueur Kamel Daoud pour une rencontre autour de son dernier roman Meursault contre-enquête (éditions Barzakh). L'occasion a été ainsi donnée à l'un des principaux animateurs de la chronique "Raina raïkoum" d'expliquer la démarche qui a donné naissance à son dernier livre, mais de s'étaler aussi sur son parcours d'écrivain journaliste, ses choix d'écriture et ses thèmes de prédilection. "Mon travail de journaliste a commencé sur un malentendu parce que j'ai cru que le métier allait me rapprocher plus de la littérature. Qu'il allait me permettre de garder contact avec l'écriture. C'était une erreur", a souligné Kamel Daoud. Et d'expliquer : "C'est un métier avec ses contraintes. Il phagocyte le temps. Parce que le journalisme en Algérie est un engagement ; d'un coup vous n'avez pas le temps de rêver." Cependant, cela ne l'a pas empêché de faire des "va-et-vient" entre la chronique et la littérature. Mais pour cette dernière, l'auteur de la Fable du nain a fait son choix. Il refuse la littérature d'engagement ou de combat, qu'il dit se terminer avec la fin des problèmes : "Je préfère la littérature qui fait rêver." Il précise : "Un livre peut être engagé, mais pas le but du livre. Si on s'enferme uniquement dans le plaidoyer, il vaut mieux être, à mon avis, avocat plutôt que romancier." Et de poursuivre : "J'étais fasciné par les grandes histoires de l'humanité que j'ai eu envie de réécrire." Un exercice de réécriture auquel il s'est adonné, d'ailleurs, dans son dernier-né Meursault contre-enquête et où, dans une démarche ludique et audacieuse, il "démantèle" l'Etranger de Camus. "J'ai inversé l'œuvre de Camus pour faire parler quelqu'un de plausible." Une démarche plus nuancée, d'où cet ajout : "J'ai démantelé l'œuvre de Camus mais avec amusement. Camus a décrit les Arabes comme des silhouettes effacées, muettes..., moi j'ai pris les pieds-noirs et je les ai mis dans le même rapport de discrétion et d'effacement par rapport au narrateur." Mais ce n'est pas dans le but d'être dans l'insulte ou le règlement de compte mais celle d'utiliser Camus comme un prétexte pour le texte. "J'ai voulu me servir de Camus pour résoudre mes propres problèmes", a reconnu Kamel Daoud. La déconstruction de l'œuvre de Camus s'est faite en poussant les limites du ludique et de la plaisanterie. L'œuvre se veut aussi un salut pour l'écrivain et pour les lecteurs et sert à répondre à ses propres questionnements, d'où le recours à des thèmes tels que le religieux et la mort, et des notions telles que la guerre et le chahid que l'écrivain-chroniqueur n'a pas hésité à "démanteler". L'auteur a expliqué qu'il a toujours voulu que "le mot ait son sens le plus positif. Pas le sens de la paresse, de démission, de fatalisme, de négation, de repli sur soi, mais qu'il ait le sens de conquête, de droit, de devoir, de source et de créativité. Le rêve n'est pas un produit secondaire de la paresse." H K Nom Adresse email