Dimanche dernier, la compétition s'est poursuivie au stade Ennasr, avec l'entrée en lice de trois troupes, qui avaient un réel sens de la scène et qui ont axé leurs prestations sur le spectacle, le divertissement. Dans la matinée, lors de l'inauguration du cycle de conférences, c'est la création qui a été la thématique centrale d'une communication portant sur la dimension humaine dans la musique diwane. Une partie du rituel de la Lila Diwan, présentée samedi dernier, à l'initiative des organisateurs du Festival national de la musique diwane (dans sa 8e édition), qui se tient jusqu'au 29 mai à Béchar (stade Ennasr pour les spectacles, maison de la culture pour les conférences), a donné un aperçu de la profondeur d'une tradition, qui n'a pas encore livré tous ses secrets. Le diwane ce sont des histoires, des légendes qui se racontent, se transmettent et se présentent dans le cadre sacré du rituel. Pourtant la troupe Sidi Blal de Mascara, qui prend part à la compétition de la 8e édition, a réussi à transposer sur scène les danses et les bradjs des Khlawiyine, dédiés aux esprits de la forêt –des morceaux qui sont généralement destinés aux initiés et dont certains maâlmine disent éviter de jouer. Avant-hier, la prestation de la troupe, qui a également participé à ce festival l'an dernier, était haute en couleurs d'autant que les koyos (danseurs) ont changé de tenues à plusieurs reprises. Si on constate une nette progression comparé à l'an dernier, Sidi Blal continue de mettre le paquet et de se concentrer sur la danse et sur l'esthétique visuelle au détriment parfois du chant ou du jeu sur l'instrument. La troupe de Mascara cèdera la scène à une formation qui a également participé l'année dernière à ce même festival, Jil Diwane El Kandoussi. Cette dernière a consacré, lors de cette troisième soirée, une grande partie de son show à la musique gnaoua, ce qui est curieux lorsqu'on participe à un festival qui a pour appellation diwane. Jil Saêd d'Oran était la dernière troupe à se produire sur la scène du stade Ennasr lors de cette troisième soirée du festival. Mené par maâlem Lahbib, qui joue au goumbri comme d'autres de la guitare et qui possède un superbe timbre de voix, la troupe –créée au début des années 2000 et reconstituée depuis trois ans (des dires de maâlem Lahbib)– a réussi à faire la jonction entre la dimension spectacle grâce au charisme du maâlem et de ses musiciens, et entre la dimension spirituelle, notamment en reprenant des bradjs rarement interprétés. Maâlem Lahbib rendra hommage, dans son chant, à maâlem Benaïssa, un grand maître du goumbri, disparu en 2008. Diwane El Bahdja d'Alger et Clé 13 de Jijel étaient les invités de cette troisième soirée. La musique, le rituel et la création Dans la matinée à la maison de la culture de Béchar, Abdelmadjid Bouguerba, chercheur dans le domaine du patrimoine culturel et politique dans le monde arabo-musulman, a inauguré le cycle de conférences avec une communication portant sur "La dimension humaine dans la musique diwane". Abdelmadjid Bouguerba, qui ne considère le diwane que par le truchement de la musique, n'a cessé de s'interroger sur la "création dans la musique diwane". Car pour lui, l'être humain tente d'exprimer "sa réalité", par le biais de l'art, et c'est par la création que dépend le salut du diwane. Ce que le conférencier concède c'est que le diwane s'est transformé, mais ce qu'il oublie est que c'est du local qu'on accède à l'universel, que c'est à partir de soi qu'on va vers l'(les) autre(s). Ce que l'assistance n'a pas manqué de rappeler au chercheur. Il a également tenté de mettre en exergue une interrogation selon laquelle "Avons-nous réussi la fondation d'un courant musical diwane algérien ?" (dans le sens de la codification). Cette assertion vole en éclat lorsqu'on sait que le diwane ce n'est pas uniquement une musique mais aussi et surtout un rituel. La création et la spécificité sont sans doute à chercher dans ce cadre-là, car on n'attend pas des musiques spirituelles qu'elles répondent aux besoins de notre époque. S. K. Nom Adresse email