Tout en avouant n'avoir "aucune donnée" sur l'état de santé de Bouteflika, Amar Saâdani impute implicitement les rumeurs sur le sujet à l'opposition. Alors que son éclipse, depuis plus de deux semaines, alimentait les rumeurs les plus folles, et au moment où la Toile s'emballait sur cette absence prolongée, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, a reçu, hier, selon un communiqué de la Présidence, Lakhdar Brahimi qui venait d'assister à Alger à la célébration de la Journée de la diplomatie algérienne (voir encadré). Quelques heures avant cette entrevue, vraisemblablement improvisée pour couper court à la rumeur qui enflait, son entourage a tenté de minimiser cette absence et ses effets sur l'opinion. Pour rappel, la dernière apparition de M. Bouteflika remonte au 21 septembre lorsqu'il a présidé une réunion consacrée à la sécurité. Depuis, et jusqu'à hier, il n'avait plus donné signe de vie alors que deux occasions, et pas des moindres, lui ont été données d'apparaître : l'affaire Gourdel et la prière de l'Aïd el-Kebir. Samedi 5 octobre, c'est le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et les présidents des deux Chambres du Parlement qui l'ont suppléé à ce rituel. Durant le rapt d'Hervé Gourdel, suivi de sa décapitation par le groupe terroriste dénommé Djound el-Khalifa, les autorités françaises n'avaient pour interlocuteur que le Premier ministre. Sur le plan protocolaire et dans pareilles circonstances, il incombait au chef de l'Etat de s'entretenir avec son homologue français. Habitués depuis sa maladie à des apparitions épisodiques du Président dans les médias lourds, les Algériens se demandaient, depuis près de deux semaines, où était le chef de l'Etat. Cette interrogation, somme toute légitime, l'est d'autant plus que les voix, jadis autorisées à évoquer la santé de Bouteflika, se sont murées dans un silence radio. Des rumeurs, qui ont même fait état du décès, en Suisse, du chef de l'Etat, ont été distillées par des médias étrangers. Ces informations n'ont pas manqué de faire le buzz sur les réseaux sociaux. Pour Amara Benyounès, SG du MPA et ministre du Commerce, il ne s'agit que d'"une énième rumeur sur la maladie de Bouteflika". M. Benyounès ajoute : "Au MPA, nous sommes choqués et consternés lorsque nous voyons des politiques reprendre des officines étrangères." Interrogé sur la santé du chef de l'Etat, M. Benyounès a répété ce qu'il avait toujours dit sur la question, estimant que son bulletin de santé "n'est pas un bulletin météo qu'il faut publier quotidiennement". "Ils ont essayé tous les coups contre lui. Après l'échec du coup d'Etat militaire, ils ont essayé un autre coup d'Etat, médical celui-là, et là, ils veulent un coup d'Etat médiatique", a répliqué le ministre du Commerce, avant de rappeler qu'ils ont "même tenté d'empêcher Bouteflika de se présenter à l'élection". "Le peuple a voté pour lui et la prochaine présidentielle se tiendra en 2019", a encore ajouté le chef du MPA. Même son de cloche chez Amar Saâdani, SG du FLN. Sans informer sur la santé de Bouteflika, il répond aux rumeurs qu'il impute implicitement à l'opposition. Ainsi, il a indiqué que les opposants au chef de l'Etat "n'ont d'autre projet que celui de prendre le pouvoir". "Ils sont en train de contester un Président élu", a-t-il ajouté. Une façon de botter en touche en esquivant la vraie question : l'état de santé du chef de l'Etat. "Ces gens n'ont de débats que sur le Président", ajoute-t-il. "La logique veut qu'un président élu, à travers des élections propres, ne puisse être déchu par des gens illégitimes", a souligné M. Saâdani, qui voit dans ces rumeurs "une agitation" de l'opposition. En revanche, Amar Saâdani s'est refusé à tout commentaire sur la santé de Bouteflika. Il a estimé qu'il ne détenait aucune "donnée médicale ou autres" sur le sujet, avant d'assurer, vers 15h, que le chef de l'Etat allait faire une apparition télévisée au JT de 20h, hier, précisant qu'il devait recevoir une personnalité qu'il ne citera pas. On apprendra plus tard qu'il s'agissait de Lakhdar Brahimi.