Placé hier, sous contrôle judiciaire irakien, le président déchu encourt la condamnation à mort, suite au rétablissement de cette peine par le nouveau pouvoir irakien. Habituellement opposé à la remise ou à l'extradition de détenus risquant la peine capitale dans leurs pays, l'Occident n'accorde pas la même considération au cas de Saddam Hussein. En effet, alors que la nouvelle autorité irakienne a annoncé d'emblée le rétablissement de la peine de mort, les Etats-Unis laissent à la justice de Bagdad le soin de juger Saddam Hussein. L'Union européenne adopte une attitude identique à travers la cour européenne des droits de l'homme, qui a débouté l'ancien chef de l'Etat irakien, qui avait introduit une requête visant à interdire aux autorités britanniques, membres de la coalition qui dirige l'Irak, de le remettre aux nouveaux dirigeants de son pays. Sa demande a été rejetée, hier, par la cour qui refuse de prendre “une mesure provisoire”. Le communiqué de cette instance a recommandé, par ailleurs, à Saddam Hussein de “poursuivre sa requête” fondée sur le risque encouru d'être condamné à mort à Strasbourg devant la cour européenne des droits de l'Homme. Les avocats de l'ex-maître de Bagdad basent leur demande également sur le fait que la justice irakienne soit “illégale”. “La justice irakienne est illégale tout comme le gouvernement intérimaire irakien qui ne détient sa légalité que des Etats-Unis”, a déclaré Me Mohammad Al Rachdane, responsable du collectif de défense de Saddam Hussein. Il a surtout dénoncé le refus du pouvoir irakien d'autoriser les avocats à plaider en Irak. Selon un avocat jordanien, Issam Ghazaoui, membre du collectif de défense, le ministre de la justice irakien a proféré à leur encontre des menaces de mort si jamais ils se rendaient en Irak. Selon cet avocat, le ministre irakien lui a dit dans un appel téléphonique : “Si vous pensez, vous et les autres, venir en Irak pour défendre Saddam, nous n'allons seulement pas vous tuer mais vous couper en morceaux, peu importe les individus ou les parties qui vous soutiennent.” Formé de vingt avocats, dont un Américain, ce collectif de défense mandaté par la famille de Saddam Hussein a accusé les Etats-Unis de les avoir empêchés de voir leur client. Il menace même d'attaquer les Etats-Unis en justice devant les juridictions internationales. Le ministre irakien de la justice, Malek Dohane Al Hassan, n'a laissé planer aucun doute sur la condamnation à mort de Saddam Hussein, si jamais il est reconnu par le tribunal qui le jugera des crimes, dont il est accusé. Hier déjà, la justice irakienne a mis en branle le processus judiciaire en adressant l'ex-président irakien et ses onze lieutenants sur leur lieu de détention une lettre détaillant les accusations portées contre eux et un mandat d'arrêt. Aujourd'hui, c'est un juge irakien, devant lequel ils seront déférés sous bonne escorte, qui leur lira leur mise en accusation conformément au code de procédure pénale irakien. Selon le porte-parole du gouvernement irakien, Girgis Saada, “les accusations contre Saddam Hussein sont multiples et portent notamment sur les fosses communes, les disparus, les attaques contre les Kurdes, la corruption et les plaintes de personnes contre lui”. En somme, il ne fait aucun doute sur le sort qui attend celui qui a dirigé l'Irak pendant près de trois décennies, à moins que l'occident n'en décide autrement. La France a été, hier, le premier pays à faire part de son opposition au rétablissement de la peine de mort en Irak. Paris a insisté sur le fait qu'“appartient en effet au peuple irakien de juger Saddam Hussein, dans un procès qui doit obéir aux règles du droit international”. K. A.