Pour prévenir un regain de violence que provoquerait le verdict du premier procès du président irakien déchu, des provinces du pays ont été placées en état d'alerte, alors que Washington a déplacé à Bagdad John Negroponte, le numéro un de la sécurité américaine. Le Haut tribunal pénal irakien rendra aujourd'hui son verdict dans l'affaire Doujaïl de Saddam Hussein, lequel, sauf surprise, devrait être la peine de mort. En effet, la peine capitale requise contre lui par le procureur devrait être prononcée par le président de ce tribunal exceptionnel constitué pour la circonstance. Ignorant les requêtes des avocats de l'ancien chef de l'Etat irakien, qui avaient boycotté les dernières audiences pour protester contre la légitimité du tribunal et la manière avec laquelle le procès a été dirigé, l'instance judiciaire rendra publique la sentence aujourd'hui. Bien que Saddam Hussein et ses sept co-accusés possèdent le droit de faire appel et que le président irakien, Jallal Talabani, avait affirmé qu'il ne donnera jamais son aval pour l'application du verdict, tout l'Irak retient son souffle. L'événement dépasse les frontières irakiennes et inquiète surtout les Américains, qui ont fait coïncider avec le verdict un déplacement du directeur du renseignement national, John Negroponte. L'inquiétude est d'autant plus grande avec la recrudescence de la violence depuis le mois d'octobre, qui a vu les Américains perdre plus d'une centaine de soldats sans oublier le nombre de victimes irakiennes. Devant cette situation, les autorités irakiennes ont instauré un couvre-feu exceptionnel à Bagdad et dans deux provinces aujourd'hui. Le gouvernement a également placé l'armée en état d'alerte et annulé toutes les permissions. “Les permissions ont été annulées et les unités ont été mises en état d'alerte pour prévenir d'éventuels événements”, a déclaré Mouaffaq al-Roubaï, le conseiller irakien à la sécurité nationale. Jetant de l'huile sur le feu, le collectif de défense de Saddam Hussein a averti des conséquences qui découleraient de sa condamnation à mort. Dans une lettre adressée à George Bush, Khalil Doulaïmi, le chef des avocats du président déchu, écrit : “La condamnation à mort mettra l'Irak à feu et à sang et mènera la région vers l'inconnu”. Selon lui : “La seule solution pour sauver l'Irak, la région et le monde était de libérer Saddam Hussein.” Renchérissant, son homologue américain, Ramsey Clark, ajoute : “La forte probabilité que des condamnations à mort entraîneront une violence plus grande et des divisions irréconciliables en Irak, montre que l'administration Bush se préoccupe plus des élections de novembre que de la vie des soldats américains, des Irakiens et de l'état de droit.” Ceci étant, sur le plan purement judiciaire, Maître Khalil Doulaïmi a affirmé que le collectif d'avocats du président déchu qu'il dirige assistera aujourd'hui au verdict.En cas de condamnation à mort ou à une peine d'emprisonnement à vie, les statuts du tribunal prévoient une procédure automatique d'appel qui sera examinée par la Chambre d'appel du Haut tribunal pénal composée de neuf juges. Celle-ci peut estimer que l'appel est fondé si elle découvre une erreur de procédure ou un non-respect du droit. Dans ce cas, un nouveau procès doit avoir lieu. Enfin, en cas de ratification de la décision prise en première instance, la sentence doit être appliquée dans les trente jours qui suivront. K. ABDELKAMEL