Un mois après la victoire du FC Porto en Ligue des champions, le Portugal, qui compte cinq “Dragons” dans ses rangs, disputera demain la finale de l'Euro de football, la première de son histoire, pour faire de 2004 l'année de sa conquête du continent. Tout un peuple l'attendait : quatre ans après son troisième échec en demi-finale d'un tournoi face au futur vainqueur (Euros 2000 et 1984 contre la France, Mondial 66 contre l'Angleterre), la Selecçao s'est enfin qualifiée pour une finale, en battant les Pays-Bas mercredi (2-1). Pouvait-elle choisir meilleur lieu et meilleur moment ? Elle l'a fait pour “son” Euro, où elle bénéficie d'un soutien populaire déterminant. Et le 30 juin marquait l'anniversaire du Mondial juniors remporté en 1991 par la “génération dorée” de Luis Figo, qui pourrait prendre sa retraite internationale après la finale. Une date qui est aussi celle à laquelle le Brésil avait remporté le Mondial-2002 avec Luiz Felipe Scolari, désormais sélectionneur du Portugal et en route pour un doublé inédit. “Le Portugal est un petit pays et j'espère que notre football franchira un palier grâce au parcours de Porto et de la sélection”, a souhaité l'attaquant Nuno Gomes. Les deux sont, en effet, indissociables. Après la défaite inaugurale contre la Grèce, Scolari a révolutionné la sélection puisque cinq joueurs de Porto y sont désormais titulaires, une ossature qui devient plus solide match après match. Mercredi, la démonstration était éclatante : une passe décisive sur corner pour Deco, Ballon d'or en puissance, et un but d'anthologie pour l'excellent Maniche. Costinha complète le milieu commun à Porto et au Portugal, qui se partagent également les défenseurs Ricardo Carvalho et Nuno Valente, promus titulaires à la place de Fernando Couto et Rui Jorge. Ce “coup de balai” n'est pas le seul mérite de Scolari, qui va prolonger jusqu'au Mondial-2006, pour lequel le prometteur Cristiano Ronaldo devrait être le fer de lance de l'équipe. Ainsi, la manière dont il a géré le “cas Figo” est remarquable. Le “galactique”, qui, furieux, s'était enfoncé dans la nuit du vestiaire après son remplacement en quarts contre l'Angleterre, en est resurgi lumineux mercredi, pour laisser éclater son talent. Car, entre-temps, Scolari a eu l'intelligence de le protéger pour éviter le psychodrame. “Scolari nous a apporté beaucoup d'expérience, a souligné Nuno Gomes. Et la bonne étoile des champions brille sur lui !” Malice ou hasard ? Le Brésilien a fait un crochet inopiné jeudi par la salle de presse du camp de base lusitanien, pour se voir applaudi par les journalistes portugais qui, il y a peu, critiquaient les choix et la personnalité de cet étranger. Certes, tout n'est pas parfait même si le Portugal a écarté trois grosses équipes, l'Espagne, l'Angleterre puis les “Orange”. L'attaque de pointe fait débat puisque Pauleta n'a pas encore marqué et que Nuno Gomes et Helder Postiga, décisifs contre l'Espagne et l'Angleterre, semblent meilleurs remplaçants que titulaires. Mais à défaut, la Selecçao compte sur des millions de joueurs de l'ombre. Sa qualification a de nouveau déclenché des scènes de délire collectif mercredi soir, avant même qu'on connaisse l'autre finaliste, République tchèque ou Grèce. Rues embouteillées, supporteurs sur le toit des bus, explosions de cris et de klaxons... Qu'arriverait-il si le Portugal remportait l'Euro ? Avant le match, un cortège de véhicules avait suivi le bus de la sélection sur le trajet jusqu'au stade Alvalade, qui nécessite d'emprunter le majestueux pont Vasco de Gama. L'explorateur avait quitté le Portugal pour les Indes le 8 juillet 1497. Dimanche, quelque 507 ans plus tard, ce sera au tour de la Selecçao de partir à la découverte de son eldorado.