Ces 5 dernières années, le secteur du BTPH, plus particulièrement celui de l'habitat, a connu un bouleversement de taille avec l'apparition d'entreprises étrangères qui, très rapidement, ont su rafler de grands projets à travers presque tout le territoire national, comme pour rappeler les conséquences de la déstructuration des grandes entreprises publiques algérienne du secteur. L'entreprise chinoise Cscec, l'une des premières à avoir pénétré de façon conséquente le marché algérien, bien que sa présence soit plus ancienne, a su s'imposer grâce au programme de logements AADL. Au niveau d'Oran, la Cscec a raflé les deux programmes 2001 et 2002 des logements AADL, soit un total de 6 000 logements implantés au niveau de la zone périphérique de l'USTO. C'est par son organisation du travail, son savoir-faire, la qualité du travail et le respect des délais que l'entreprise chinoise a su se démarquer de tous les autres concurrents. Une sorte de carte de visite qui lui a permis également de décrocher des projets très importants d'équipements, comme celui du nouvel établissement hospitalier EHU d'Oran, le projet du Sheraton pour le compte d'actionnaires libyens et algériens. Aujourd'hui, malgré tout, la Cscec essuie quelques critiques pour des dépassements de délais et autres malfaçons survenus sur certains de ses projets en cours mais sans pour autant que soit remise en cause sa présence ou sa compétence. Comme nous le dira l'un de nos interlocuteur : “Les Chinois nous ont beaucoup apportés, car ils nous ont permis d'avoir des références en matière de qualité et de respect des normes…”. Une autre entreprise semble vouloir s'imposer aujourd'hui au niveau de l'Ouest, il s'agit de la société turque Atlas GC Compagny qui, elle aussi, à travers un programme de logements sociaux, est en train de s'imposer sur le marché. Cette société réalise depuis 2003 pour le compte de l'Opgi un programme de 2 000 logements sociaux avec un délai contractuel de 18 mois. De plus, elle a soumissionné pour deux autres projets l'un pour la réalisation de 1 520 logements financés par le Fonds d'Abu Dhabi de développement (FADD) et pour la réalisation de 480 logements financés cette fois par le Fonds saoudien de développement (FSD). Mais dans les deux cas, les avis d'appel d'offres ont été infructueux et l'attribution des projets se fera suite à des consultations restreintes qui la mettent en concurrence avec une société algérienne. Les deux fonds saoudien et d'Abu Dhabi ont, pour leur part, accordé une autorisation de programme de 522 millions de dinars et 2,4 milliards de dinars comme cela nous a été précisé à l'Opgi. Pour leur part, les Turcs ambitionnent encore de décrocher d'autres projets d'équipement à Tlemcen, Sidi Bel Abbès, alors qu'à Oran ils se sont déjà vu confier la réalisation d'un établissement scolaire. Le directeur de l'OPGI qui est le maître d'ouvrage délégué pour les projets de logements sociaux, explique l'émergence des entreprises étrangères pour deux raisons principales : “Les grandes entreprises algériennes qui étaient déstructurées ont donné naissance à des filiales sans grandes ambitions, le privé émerge à peine ; de plus, nous constatons aujourd'hui que la main-d'œuvre algérienne ne donne pas satisfaction en qualité et en rendement. Les CFPA ne forment plus de plâtriers, de carreleurs, de maçons, ils n'ont pas de demande pour ces types de formations parce que cela ne paie pas bien...”. Et de poursuivre : “Nous devons faire face à une demande très forte en matière de logements. Avec 100 000 logts/an à construire, nous arriverons juste à maintenir l'actuel taux d'occupation. Pour réduire le déficit, il faut arriver à 5 millions de logts d'ici à 5 ans et nous n'y parviendrons que si nous faisons appel aux entreprises étrangères.” Pour appuyer son argumentaire, notre interlocuteur nous cite l'exemple de la société turque qui, sur le chantier des 200 logts, réalise 4 logts toutes les 18 heures. Quant aux critiques formulées par des entrepreneurs algériens sur les prix favorisants les entreprises étrangères notamment le m3 de béton ou le prix du m2, l'intervenant s'explique encore : “Le code des marchés publié prévoit une préférence pour les entreprises algériennes même si celles-ci proposent des prix plus élevés de 15%. D'ailleurs, les entreprises étrangères ne se sont pas trompées en créant des filiales de droit algérien pour avoir ces avantages. Quant au prix du m2, c'est un prix de référence …”. Et de nous rappeler que pour le programme LSP réalisé à 90% par le privé, le m2 serait de 20 000 DA plus les locaux qui leur sont attribués. Pour sa part, l'Opgi se serait mis d'accord avec la société turque Atlas GC Compagny pour un prix de 17 500 DA le m2. La question que se posent néanmoins nombre d'observateurs est de savoir si la déstructuration et la dissolution des grandes entreprises algériennes du bâtiment étaient la seule voie pour finalement aboutir seulement, 10 ans après, à un débat sur la qualité et le rendement de la main-d'œuvre dans notre pays. F. B.