Une multitude de signes d'un dépassement apparaissent dans la société algérienne chez qui l'aspiration à la paix est plus forte que tous les marchandages politiques. Au lendemain de son évocation par le président de la République, l'idée d'une amnistie générale est l'objet d'une appréciation nuancée sinon différenciée des partis politiques qui ne s'inscrivent pas dans la mouvance présidentielle. Assiste-t-on à un remake du débat provoqué en 1999 par la loi sur la concorde civile ? Le contexte est certes sensiblement différent, mais les réserves et les appréhensions exprimées çà et là, s'agissant d'une proposition venue du pouvoir, semblent participer d'une démarche similaire. Aux yeux de ces acteurs politiques, le pouvoir est d'abord coupable de la reconduction sans fin d'une dynamique de son propre maintien, avec les mêmes tares originelles qui ne l'habilitent pas à une entreprise d'une telle envergure. En un mot, sans s'inscrire frontalement contre le projet d'une aministie qui viendrait couronner et consacrer la réconciliation nationale, ils soupçonnent le président Bouteflika de viser un profit politicien. Ils en veulent pour sa politique de concorde civile qui a absous sans sanctionner et réhabiliter sans demander de comptes. Ce souci de faire intervenir la justice est partagé par les associations des familles de disparus qui y ajoutent une demande de vérité. La réconciliation nationale et son prolongement juridique amnistiant sont-ils en train d'être pris dans le marigot gluant et paralysant de vieilles querelles politiciennes ? Auquel cas, ce serait une preuve que les temps ne sont pas encore mûrs pour la promotion d'une réconciliation totale entre Algériens tant les plaies sont encore purulentes et les ressentiments vivaces. On aura d'ailleurs remarqué avec quelle prudence excessive le président Bouteflika s'est hasardé sur un terrain qu'il sait miné. C'est sa manière de laisser macérer, sachant d'avance que le camp adverse est pour longtemps dans l'incapacité d'adopter une position commune. À y regarder de près pourtant, une multitude de signes d'un dépassement apparaissent dans la société algérienne chez qui l'aspiration à la paix est plus forte que tous les marchandages politiques. Si les Algériens sont de moins en moins enclins à s'entretuer, c'est sans doute parce qu'il se trouve des raisons de vouloir vivre ensemble. Et si la solution était dans cette direction ? A. H.