Le Chef du gouvernement, M. Ahmed Ouyahia, a affirmé lundi soir qu'il n'était plus possible d'entrer dans l'économie de marché avec les méthodes éculées des dernières décennies comme il est vain d'aspirer à l'ouverture sur le marché mondial avec des entreprises encore “sous domination de l'Etat ou de l'administration”. Cité par l'APS, il a réitéré que les 1 200 entreprises publiques économiques existantes “seront proposées à la privatisation, hormis les entreprises stratégiques”. Simple fait d'annonce ou bien réellement le gouvernement, après l'élection de Abdelaziz Bouteflika, veut accélérer les réformes structurelles ? Difficile de répondre à la question. C'est que l'Algérie, depuis 1995, en dehors des cas du complexe sidérurgique d'El-Hadjar et des usines de détergents de l'Enad, et hormis la cession d'actifs d'environ 650 entreprises publiques locales dissoutes, aucune autre grande entreprise n'a été privatisée. Le premier train de privatisation avait proposé pas moins de 250 unités de diverses branches d'activité. Il sera abandonné à la faveur du changement du gouvernement. 1998. Trois séances d'ouverture des plis ont concerné des unités industrielles : 11 briqueteries, eaux minérales, limonaderies et brasseries. Pour les briqueteries, les soumissions reçues sont au nombre de 19, alors que 86 cahiers des charges ont été retirés, soit un taux de près de 23%. Les 19 soumissions sont anonymes et contiennent soit une garantie bancaire, soit un chèque. Elles ont toutes été jugées recevables. Pour les brasseries, limonaderies et eaux minérales, les soumissions sont au nombre de 17 (dont une porte sur les 12 unités) ; 115 cahiers des charges ont été retirés. Aucune de ces opérations n'a pu aboutir. Les gouvernements qui se sont succédé n'ont jamais donné les raisons de la non-privatisation de ces unités dont les soumissions pourtant ont été jugées recevables. Les changements apportés sur le plan organisationnel à la gestion des capitaux marchands de l'Etat n'ont pas “dépolitisé” le processus de privatisation. Les tergiversations et atermoiements entretenus par le gouvernement ont fait que les acquéreurs potentiels ne se bousculent pas au portillon. En parallèle, les entreprises publiques, face au dynamisme du secteur privé, perdent de plus en plus de parts de marché. L'endettement des EPE, malgré plusieurs mesures d'assainissement, était estimé à 880 milliards de dinars à fin 2002. 546 entreprises étaient déficitaires et plus de 300 parmi elles présentent un actif net négatif, soit une situation de faillite au sens de la loi. La privatisation ou le partenariat sont à juste titre l'unique solution pour sauver les entreprises publiques. Mais voilà, le gouvernement s'est engagé à ne privatiser que si le partenaire social est consulté. La sortie du Chef du gouvernement, publiée par l'APS, à la veille de la tenue d'une rencontre de l'Ugta justement pour examiner l'offre du gouvernement sur la stratégie industrielle, peut provoquer des malentendus qui risquent de reporter, encore une fois, le processus de privatisation. M. R.