Résumé : Distraite, Taos versait du café dans les tasses mais son esprit était préoccupé. Halima, sa belle-sœur, la provoque en lui parlant du célibat de Wassila. Taos s'emporte et demande à Halima de garder ses distances. Saïd, son mari, les interrompt... Il connaissait les femmes et leur déboires... Assise à l'autre bout du salon, Soraya et Kahina se chuchotaient des choses... Indignée, Halima se tourne vers ses filles : -De quoi parlez-vous toutes les deux ? -De rien maman, lance Soraya d'une petite voix... Nous regardions juste le tatouage de khalti Taos... Elle a un petit lutin sur son front qui semble danser au rythme de ses expressions. Taos porte la main à son front : -Ce n'est pas un lutin petites chipies... C'est un losange. Il est vrai qu'on ne le voit plus aussi nettement qu'auparavant, mais il ne ressemble pas du tout à un lutin... Tout à coup, elle se met à rire : -Je l'ai totalement oublié celui-là... J'étais une adolescente lorsque ma défunte grand-mère m'avait tatouée pour éloigner de moi le mauvais œil... Depuis, je n'y ai plus fait attention... C'est curieux qu'auparavant vous ne l'ayez pas remarqué. -Si... Nous l'avons remarqué, répondit Soraya...Mais on dirait qu'aujourd'hui il est bien plus visible. -Hum... Vous avez peut-être raison. Aujourd'hui, je me suis un peu emballée, c'est pour cela que vous avez suivi l'expression de mes traits, et de ce fait remarqué mon tatouage... Elle soupire : -À l'époque de mon adolescence, on tatouait aussi les femmes pour les embellir et attirer d'éventuels prétendants. Ou des mères de famille ayant des garçons en âge d'être mariés... Saïd sourit : -Pourtant je n'avais pas remarqué ce tatouage au début de notre mariage... -Toi, tu ne remarques rien... Ou plutôt si. Tu remarque ce qui te plaît. Il tape dans ses mains : -Bien dit ma chère femme... Mais il faut aussi préciser qu'à cette époque tu aimais cacher ton front sous les franges de ton foulard. Moi je ne pouvais deviner tout ça... Taos s'agite : -Tiens, j'apprends des choses aujourd'hui... C'est un peu bizarre toute cette conversation et ces remarques. Halima lui donne une tape : -Ne te fâche pas... Les filles et Saïd sont tombés sur un sujet un peu drôle. Mais ce n'est pas aussi tragique que ça. Taos porte la main à son front : -J'aurais pourtant juré que ce tatouage ne se voyait plus... -Allons Taos... N'en fais pas une histoire. Elle se lève : -Allez, les enfants, je crois qu'il est temps pour nous de rentrer. -Déjà ! -Oui, ma chère belle-sœur... Je te remercie pour ce succulent déjeuner que tu nous as préparé, nous l'avons vraiment apprécié... Dommage que Wassila ne fût pas parmi nous... -Je suis désolée qu'elle n'ait pu partager notre réunion de famille... Le boulot l'accapare trop ces dernier temps... Mais ce n'est que partie remise. Je te promets, Halima, que la prochaine fois que tu viendras, c'est elle-même qui préparera le déjeuner. -Je l'espère ma chère Taos... Songe tout de même à la pousser à se caser au plus vite... -Je ferai de mon mieux... Son mektoub viendra au moment voulu. -Ce mektoub, il faut savoir le provoquer aussi... Elle lui fait un clin d'œil et s'approche un peu plus d'elle pour lui chuchoter : -Toutes les femmes tentent de pousser leurs filles à se caser d'une manière ou d'une autre. Tu comprends ? Ne sois pas trop vieux jeu, et fais en sorte qu'elle ne reste pas célibataire indéfiniment. -Je ne vais tout de même pas la brader dans une foire... -Dans une foire ? Non, mais il faut savoir attirer les abeilles au bon moment. Il suffit d'un appât...Les hommes d'aujourd'hui aiment les femmes actives et débrouillardes... Alors sache la mettre sur les rails. Halima et sa famille prennent congé, et Taos, pensive, retourne dans sa cuisine. Vers la fin de l'après-midi, le véhicule de Athmane s'arrête devant un salon de coiffure situé non loin de son quartier. -Alors Wassila, tu veux tout de même passer au salon alors que la journée est terminée ? -Pas pour tout le monde. Nous recevons des clientes parfois jusqu'à vingt heures. J'ai demandé à Feriel de me remplacer pour l'après-midi, mais je dois la libérer. La pauvre, elle habite à une quinzaine de kilomètres et risque de rater le dernier bus. -Alors, je te laisse là... On s'appellera bien sûr. Il se penche et dépose deux bises sur ses joues : -À ce soir donc. -Oui, c'est ça. Wassila descend du véhicule et entre dans le salon de coiffure qui grouillait encore de femmes. Elle entrevit son amie Feriel, qui terminait de maquiller une mariée, et s'approche d'elle. -Désolé pour le retard Feriel. Si tu veux rentrer, tu es libre, je vais prendre la relève. -Ce n'est pas trop tôt, rétorque Feriel, en faisant mine de se fâcher. -Je t'assure que ce n'est pas de ma faute. Athmane m'a emmenée dans un endroit féerique, et j'ai oublié que j'avais donné des rendez-vous. (À suivre) Y. H.