Ils sont venus de plusieurs wilayas et régions du pays, Boumerdès, Blida, Arzew et Oran, pour un rassemblement de protestation inédit devant le siège de leur employeur, la compagnie de transport des hydrocarbures Hyproc Shipping Compagny, filiale de Sonatrach. Plus d'une quarantaine de marins d'Hyproc, dont le siège de la direction générale est basé à Oran, se sont retrouvés, hier, tôt dans la matinée, pour exiger la tenue d'une assemblée générale et demander la dissolution de la section syndicale UGTA afin de faire aboutir leurs revendications socioprofessionnelles. Car c'est bien là que se trouvent les raisons de cette protestation et le profond malaise social, attisant la colère des marins qui estiment que leurs droits et acquis sociaux sont bafoués du fait "d'un syndicat maison", comme ils nous l'ont expliqué. "Cela fait 4 mandats du syndicat qui n'a pas tenu une seule assemblée générale. La dernière section en date a vu son mandat dépassé depuis deux mois et ils ne font rien, cela fait 15 ans que ce sont les mêmes personnes qui restent à la tête du syndicat et ne défendent même pas nos droits", lâchent en chœur les marins regroupés face à l'entrée d'Hyproc. Pour ces derniers qui restent en mer 2 mois et 17 jours, "il est temps que les marins tiennent leur AG et désignent une nouvelle section syndicale qui saura défendre nos acquis", précisent-ils. Durant de longues minutes, ils évoquent la pénibilité de leur métier, marins sur des méthaniers, les maladies professionnelles non reconnues notamment du fait de la présence de l'amiante sur les anciens navires, les salaires méprisants pour les marins algériens alors que les Philippins ont droit à des avantages bien plus importants sur les navires algériens. L'absence du 13e mois, des primes amputées à moitié ou encore "la prime de zone qui reste à ce jour calculée sur le salaire de base de 2009 alors que depuis il y a eu trois augmentations", sont aussi parmi leurs doléances. Nos interlocuteurs, qui mettent encore en avant le fait d'être au "cœur des intérêts de la compagnie et du pays", dénoncent les disparités et discriminations salariales dont ils sont victimes, comparativement aux "responsables administratifs qui ne sont pas dans la production" et nombreux de témoigner : "Nous avons des collègues qui sont décédés à peine un an après leur retraite. Après 40 ans de service pour la compagnie, nous nous retrouvons avec une retraite de 40 000 DA. Nous n'avons jamais pu voir nos enfants grandir, nous sommes tout le temps en mer dans des conditions difficiles et nous n'avons même pas de congé annuel si ce n'est un congé de récupération. Les nuisances à bord sont grandes du fait de notre métier spécifique et nous n'avons même pas de statut particulier", expliquent à tour de rôle les marins. Hier matin, certains n'ont pas hésité et sont allés jusqu'à menacer de recourir à "la grève et bloquer les méthaniers au quai". Pour l'heure, les marins d'Hyproc entendent obtenir la dissolution de la section syndicale et de pouvoir désigner librement leurs délégués qui auront pour tâche de défendre comme il se doit leurs droits, nous ont-ils encore affirmé. Ce n'est pas la première fois que les marins sortent dans la rue pour revendiquer l'amélioration de leur condition socioprofessionnelle. Les revendications sont déjà vieilles de 2 ans. En 2012, les marins avaient protesté contre l'absence d'un statut qui puisse les protéger après les départs à la retraite. Mais les autorités continuent de faire la sourde oreille. D. L