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"Le statu quo nous mènera irrémédiablement vers le FMI"
L'ancien gouverneur de la banque d'Algérie
Publié dans Liberté le 21 - 12 - 2014

L'ancien gouverneur de la Banque d'Algérie, Abderrahmane Hadj Nacer, se veut des plus formel quant à ce qui attend l'Algérie face à la dégringolade actuelle des prix du pétrole. "Le statu quo nous mènera irrémédiablement vers le FMI", a-t-il déclaré, hier, à Tizi Ouzou.
Lors d'une conférence-débat qu'il a animée hier à l'Insim, Abderrahmane Hadj Nacer a expliqué que l'Algérie peut tenir 3 ou 4, voire 5 ans, mais nous sommes dans un mouvement très brutal qui pourra nous amener dans
6 ans à retourner au Fonds monétaire international (FMI). Sauf que cette fois, a-t-il averti, nous risquons de négocier en position beaucoup plus amoindrie que durant la fin des années 1980, et c'est cela que préfère, dit-il, le FMI qui n'est en fait qu'un instrument de contrôle et de soumission entre les mains des puissants. "La situation actuelle n'a rien à voir avec celle des années 1980 lorsque l'Algérie n'avait plus la capacité de financer son alimentation, mais disposait encore d'institutions d'anticipation qui assuraient une cohésion globale, telles que l'Institut de stratégie globale dont le rôle était d'assurer une coordination avec l'institution militaire qui était une pièce maîtresse et aussi le secrétariat général du gouvernement qui avait un rôle important", a expliqué Abderrahmane Hadj Nacer, qui déplore qu'aujourd'hui qu'on ait cassé le mode de fonctionnement institutionnel. "Aujourd'hui, nous sommes dans un contexte où il n'y a plus d'institutions d'anticipation et de cohérence, mais plutôt des bureaux, des lois antinomiques et souvent contradictoires", a souligné l'auteur de Martingale algérienne : réflexion sur une crise. Pour le conférencier, l'Algérie n'a même plus l'équilibre des pouvoirs nécessaires pour prendre des décisions que le peuple pourrait accepter comme autrefois lorsque, rappelle-t-il, tout le monde écoutait tout le monde et qu'il n'y avait pas un seul pôle du pouvoir qui imposait ses décisions. "Aujourd'hui, nous sommes dans une approche prédatrice très violente", a-t-il résumé, tout en notant que la situation financière du pays est caractérisée par une lutte entre ce qu'il nomme "l'argent brutal" et "l'impôt historique".
Pour l'ancien gouverneur de la Banque centrale d'Algérie, la situation ne peut pas être redressée sans le retour à la légitimité et la transparence qui nous permettra de faire face au FMI. "Le défi qui attend l'Algérie est de passer à la troisième phase de son histoire, qui signifie le passage à la légitimité à travers le système d'assemblée et donc de confiance", préconise-t-il.
Interrogé sur les assurances que tentent de mettre en avant les membres du gouvernement face à la chute des prix du pétrole, Hadj Nacer dira, tout en refusant de polémiquer, que "les ministres n'ont pas la capacité de refléter les rapports de force". Leurs manifestations sont "hors du temps" et leurs réactions sont à la fois "illégitimes et impossibles à mettre en œuvre", a-t-il estimé, tout en citant le cas du patron de Cevital qui fait, dit-il, ce que l'Etat devait faire depuis 2004 et, aujourd'hui, alors qu'il veut se développer à l'international, on veut l'entraver faisant fi des changements et bouleversements internationaux qui font que même les règles du droit ont changé comme le montre l'arbitrage international qui a pris le dessus sur toutes les lois. Sur la dévaluation du dinar, ce sujet qui fâche à chaque fois les autorités monétaires, Abderrahmane Hadj Nacer n'a laissé aucune chance à l'optimisme. "La dévaluation du dinar ne peut que s'accentuer", a-t-il répondu, avant d'expliquer que tout est lié à l'élément de confiance. "À la confiance du peuple envers ses gouvernants et du monde extérieur vis-à-vis de l'Algérie, or l'Algérien continue de faire fuir ses capitaux faisant ainsi confiance plutôt à d'autres monnaies et les gouvernants refusent la convertibilité, et quand on refuse la convertibilité, c'est qu'on refuse de rendre des comptes", a-t-il analysé, non sans préciser que les gouvernants préfèrent le statu quo qui permet de gérer en vase clos et les étrangers n'hésitent pas à aider à son maintien.
S. L.


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