Plusieurs fédérations de la Centrale syndicale ont exprimé le rejet de l'opération de privatisation proposée par le ministre de la Participation et de la Promotion des investissements. Le bras de fer entre les ministres proches de Bouteflika et la centrale syndicale est bel bien engagé. Mercredi dernier, devant les hommes d'affaires japonais, Abdelhamid Temmar, ministre de la Participation et de la promotion des investissements, accuse “les lobbies et autres intérêts” de vouloir bloquer le processus de privatisation. “Les lenteurs sont dues aux lobbies et aux intérêts qui se forment et se déforment”, soutient-il. Selon lui, les dés “semblent être jetés”. “À partir de janvier, les choses vont changer”, annonce le ministre, sans dire comment, ni quelle sera la nature des changements. Tout le monde aura compris que Temmar répond ainsi à l'UGTA qui l'accuse de “tricheur”. Le ministre de la Participation ne paraît pas gêné par la contestation qui s'amplifie, chaque jour, de l'UGTA. “Il n'y a pas de problèmes pour les réformes”, affirme le ministre de la Participation et de la Promotion des investissements, comme s'il voulait par là rassurer les hommes d'affaires nippons. C'est que, selon Temmar, depuis 1999, c'est-à-dire depuis que Bouteflika est président, “le pays s'est doté d'un bloc réformateur aux parlements”. Temmar est convaincu que “l'efficience de notre économie passe par la libéralisation totale”. Les ministres proches de Bouteflika, à la tête d'ailleurs des principaux départements économiques, sont sur la même longueur d'onde. Prenant la parole, le ministre de l'Energie, comme pour soutenir son collègue de la Participation et de la Promotion des investissements, affirme que “la libéralisation de l'économie est au point de non-retour”, oubliant que son avant-projet de loi sur les hydrocarbures sommeille depuis plus de deux années dans les tiroirs du secrétariat du Chef du gouvernement. L'UGTA, elle, conteste la démarche prônée par Chakib Khelil et Abdelhamid Temmar, et réclame une bipartite “pour définir une stratégie économique nationale”. La centrale syndicale affirme que devant l'échec des négociations avec Temmar, “Benflis est notre seul interlocuteur”. Les différentes fédérations de l'UGTA commencent à se mobiliser. La Fédération nationale des travailleurs des secteurs de la métallurgie, de la mécanique, de l'électricité et de l'électronique, dans un communiqué rendu public mercredi dernier, s'oppose à la privatisation des entreprises du secteur. “Nous refusons de façon catégorique ces décisions unilatérales”, soulignent les rédacteurs du texte. La fédération a précisé que “l'opération de privatisation ne peut en aucun cas constituer une fin en soi, mais doit être la dernière mesure dans une stratégie nationale de développement économique global”. La fédération appelle à “arrêter l'application de ces décisions vu leur impact grave sur les travailleurs”. La fédération, ajoute le communiqué, “se réserve le droit de contestation”. C'est le cas pour l'Enof. Selon certaines sources de la centrale syndicale, d'autres fédérations vont rejoindre le mouvement de contestation, avec cette menace pesante d'une grève nationale. Mais il n'y a pas que l'UGTA qui ne partage pas les options libérales prônées par les ministres proches de Bouteflika. Le président du Conseil national économique et social (Cnes), dans sa dernière session, a par ailleurs violemment critiqué “le discours faisant du désengagement de l'Etat la seule forme du devenir économique compatible avec le système de marché, selon le dogme ultralibéral, pernicieusement introduit chez nous dans le sillage du programme d'ajustement économique”. Selon lui, ces thèses ont été invalidées dans la réalité. “Leur échec, chez nous, a revêtu une forme retentissante dans certains pays d'Amérique latine soumis aux injonctions répétées des institutions financières internationales”, affirme Mentouri. Dans cette cacophonie ambiante, Benflis, Chef du gouvernement, est épargné par la critique, lui chargé par le président de la République d'appliquer son programme. Il est même mis en avant comme arbitre. C'est que tout le monde aura constaté que la décision lui échappe. Et que tout est concentré entre les mains de Bouteflika. M. R.