Le Premier ministre s'est contenté de dépêcher une commission interministérielle pour faire l'état des lieux au niveau des 14 wilayas côtières avant de se prononcer. La cacophonie, qui s'est installée, ces derniers jours, au sein du gouvernement quant à l'épineux dossier relatif à la concession des plages, a mis les walis des régions côtières dans un véritable embarras et cela à quelques jours seulement de l'ouverture de la saison estivale. Entre la décision "verbale" du ministère de l'Intérieur, qui ne veut plus entendre parler de concession, et l'opiniâtreté du ministre du Tourisme qui veut maintenir cette concession déjà encadrée par la loi 03/02 du 17 février 2003 ainsi que le décret et le décret n°04-274 du 5 septembre 2004, les walis sont en train de nager entre deux eaux. D'une part, ils n'ont reçu aucune nouvelle instruction ou un écrit, et d'autre part, en tant que commis de l'Etat, ils s'en tiennent aux lois en vigueur. Pour rappel, il y a quelques jours, Azzedine Belkacem Nacer, directeur général des collectivités locales au ministère de l'Intérieur, avait annoncé, en marge d'une visite effectuée à Oran, que son département prendra toutes les dispositions nécessaires pour mettre fin à la concession des plages à partir de cette saison estivale, précisant que "tous les contrats de concession des plages accordés jusqu'ici seront annulés, tandis que le ministère n'accordera plus de nouvelles concessions", avant d'ajouter que "des mesures concrètes seront prises pour mettre en application cette décision". Cette déclaration, lue au journal du 20h de l'ENTV, n'a pas été du goût de la ministre du Tourisme qui a vu dans cette sortie un empiétement sur ses propres prérogatives puisque les plages relèvent bel et bien de son département même si le gros travail, dans ce domaine précis, est souvent déployé par les collectivités locales. En plus, une simple déclaration qui, de surcroît, n'a même pas été suivie d'une instruction, comme l'avait promis Belkacem Nacer, ne peut en aucun cas se substituer à une loi ou un décret d'où le silence de Abdelmalek Sellal qui n'a pas encore tranché au sujet de cette décision. Le Premier ministre, visiblement mal à l'aise par les sorties contradictoires de ses ministres, s'est contenté de dépêcher une commission interministérielle pour faire l'état des lieux au niveau des 14 wilayas côtières avant de se prononcer. M. Sellal veut être rassuré de tous les côtés à commencer par l'applicabilité sur le terrain de cette directive qui risque de connaître le même fiasco enregistré dans l'instruction datée de 2011 relative à la gestion des parkings. Car comme les parkings, les plages sont gérées par des jeunes chômeurs qui ne sont pas prêts de céder facilement à cette nouvelle donnée d'autant plus que dans plusieurs wilayas les contrats de concession s'étalent parfois de 3 à 5 années rendant ainsi difficile leur annulation. Et dans ce cas de figure, la décision de la ministre du Tourisme de maintenir un tiers des plages pour les concessionnaires et les 2/3 laissés libres et gratuits paraît la plus lucide pour de nombreux responsables en charge de la gestion de ce dossier. Mais en attendant, chaque wali tente, ces jours-ci, d'agir selon la spécificité et les difficultés propres à sa wilaya et ses communes. Si à Alger, la gestion des plages a été officiellement confiée à l'établissement public Opla (Office des parcs des sports et des loisirs d'Alger) et à la régie foncière d'Alger comme nous l'a expliqué hier M. Benathmane, directeur local du tourisme et de l'artisanat, à Boumerdès de nouvelles concessions de plages ont été établies par des APC, la semaine dernière, mais avec un nouveau cahier des charges au profit des jeunes chômeurs, indique le directeur, M. Zoulim. "Cette argent sert à financer le nettoyage des plages des communes démunies", confie-t-il. À Annaba, certaines plages ne seront pas concédées comme nous l'a confié hier le directeur local du tourisme, M. Bounaffa, alors que dans la wilaya de Tizi Ouzou, il a été décidé de ne concéder aucune plage, affirme pour sa part, Rachid Ghedouche, directeur du tourisme. Si comme on le constate, la confusion née au sommet est descendue "en bas", il n'en demeure pas moins que les déclarations de Azzedine Belkacem Nacer, directeur général des collectivités locales, par qui la polémique est arrivée, ont le mérite de bousculer les mentalités et l'ordre établi. Désormais, les plages seront plus propres avec l'acquisition dans les prochains jours de machines de nettoyage des plages pour toutes les wilayas côtières. "En plus de ces machines, des miradors et des bornes de balisage pour se protéger contre les jet-skis seront obligatoires au niveau de toutes les plages", affirme le directeur local du tourisme de la wilaya d'Alger qui nous apprend, par ailleurs, que pour cette année des gardes communaux seront déployés pour assurer la sécurité de certaines plages parmi les 72 autorisées à la baignade au niveau de la wilaya. "Ces plages, dont l'accès sera gratuit, seront dotées de toutes les commodités, cabines de déshabillage, douches avec en plus des parasols et tables offerts gratuitement par l'Opla aux estivants", ajoute notre interlocuteur. Dans la wilaya de Annaba, on s'attelle à appliquer les directives du ministère de l'Intérieur quant à l'accès libre aux 21 plages que compte la wilaya, sauf pour les plages attenant aux hôtels et complexes touristiques, nous affirme M. Bounafaa. À Boumerdès, un tiers des lots existants sur les 35 plages seront maintenus en concession, les autres seront libres d'accès. "Des pancartes seront installées un peu partout expliquant les clauses, les prix de concession et le nom du concessionnaire" et d'autres panneaux seront installés devant les plages gratuites et libres d'accès. "Nous avons déjà mis en place tout un dispositif pour accueillir dans de meilleures conditions nos estivants", affirme M. Zoulim. À Boumerdès, l'heure est au grand toilettage avec l'aménagement des espaces verts, la réfection de l'éclairage public et l'aménagement des accès aux plages, a-t-on constaté sur place. Dans la wilaya de Tizi ouzou, les autorités, qui n'ont pas reçu d'écrit, comme les autres wilayas, au sujet des concessions des plages, semblent, elles aussi, décidées à se séparer des concessionnaires. "Sur les 8 plages recensées, quatre ont été concédées pour cinq ans, mais nous allons annuler ces contrats puisque le payement se fait chaque année et non pour 5 ans", affirme M. Gheddouche. La wilaya est allée jusqu'à confier la gestion des parkings aux APC moyennant seulement 25 DA. "Nous avons déjà entamé les travaux de réfection de routes menant aux plages et nous allons acquérir deux machines de nettoyage des plages et un rouleau nettoyeur de sable en sus des autres équipements comme les miradors, les cabines de toilettes, de déshabillage, etc.", dit-il. M. T.