Tout ce qui a été raconté par les Américains sur sa capture est faux, affirme l'ancien maître de Bagdad par la voix de l'avocat irakien Khalil Doulaïmi, qui s'est confié au journal cairote “Al Ousboue”. D'emblée, Saddam Hussein dément avoir été arrêté dans le trou souterrain à Tikrit comme l'ont montré les médias de la planète. Il s'agissait d'images fabriquées par les spécialistes en la matière du Pentagone, assure-t-il. Version Saddam de la capture Le président irakien affirme qu'il a été capturé au moment où il accomplissait la prière du "maghreb" dans le domicile d'un de ses amis, en lequel il avait entièrement confiance. "C'est à ce moment, alors que mon arme était loin de moi, que je me suis retrouvé entouré de soldats américains", raconte à son avocat Saddam. Il enchaînera : "Après mon arrestation, j'ai subi les pires tortures lors des deux jours qui suivirent." "Si j'avais pris connaissance de la présence des militaires US, je les aurais combattus jusqu'au martyr. Je n'étais pas dans un trou, et je refuse d'être dans un trou", poursuit-il. Les Américains l'ont montré à son peuple et au monde dans des conditions avilissantes "dans le but évident de me discréditer", a-t-il précisé. Outre la torture, le président déchu déclare avoir fait l'objet de terribles pressions et de menaces pour l'affaiblir physiquement et, surtout, moralement. Il assume la résistance irakienne Saddam passera ensuite à l'après-occupation de l'Irak et à l'organisation du mouvement de la résistance. "Il vous faudra emprisonner tout le peuple irakien si vous le pouvez", lancera-t-il en direction des Américains, pour leur montrer que c'est la seule solution pour mettre un terme à la guérilla. Selon lui, "la résistance irakienne s'est bien préparée. Les Irakiens ne négligeront jamais leur honneur comme le pensent les Américains et leurs alliés". Partant de là, il précisera que "la seconde étape de la résistance a été déclenchée le 11 avril 2004, soit deux jours seulement après l'occupation". "Je me suis réuni avec les chefs militaires et politiques et je leur ait dit que maintenant il fallait entamer la deuxième partie de la bataille. Ce qui se passe aujourd'hui n'est ni le fruit du hasard ni une réaction ponctuelle", insistera Saddam Hussein. Il ne manquera pas de dire que la majeure partie des cadres de la résistance sont des officiers et des soldats de l'ancienne armée irakienne. La traîtrise derrière la chute rapide de Bagdad L'on se rappelle que la capitale irakienne n'a guère résisté devant l'avancée des forces américaines en avril 2004. Cette chute brutale avait soulevé moult interrogations au sein de l'opinion publique locale et internationale. Le "raïs" irakien confirme la thèse de la traîtrise. "Nous savions que ce jour-là allait arriver et nous étions certains que la grande bataille débutera après l'occupation de Bagdad et pas avant. Oui, il y a eu traîtrise d'une catégorie très restreinte", avoue-t-il. En dépit de cela, racontera-t-il, "l'héroïque armée irakienne et les vaillants militants savaient que la seconde étape avait commencé, et se sont bien préparés avec les moyens de bord pour ce jour que les Américains n'avaient jamais prévu dans leurs scénarii". Ainsi, l'ex-chef de l'Etat irakien donne donc beaucoup de crédit à la thèse justifiant la chute sans résistance de Bagdad entre les mains des soldats US, qui n'ont pas eu à livrer bataille pour en prendre possession en un temps record. Procès illégal Passant ensuite à son procès, Saddam ne reconnaît aucune légitimité au tribunal chargé de le juger, qu'il qualifie d'anti-constitutionnel. "C'est une mascarade et une insulte à la justice et à la loi. Ils ont mis en place un tribunal sur la base de décisions sans aucune valeur juridique sous le joug de l'occupation. Ceci constitue une spoliation du pouvoir légitime, et une violation grave des lois irakiennes et internationales", a affirmé Saddam Hussein à son défenseur lors de leur entrevue. Quant à son moral, il n'a laissé aucun doute quant à "sa sérénité totale, son optimisme et sa certitude" que "le moment de la victoire était beaucoup plus proche que ne le pensent certains". Il semble avoir repris confiance en ses potentialités et se montre déterminé à tenir tête à ses juges et aux Américains surtout, en dépit de sa détention. L'Iran derrière le gazage des Kurdes à Hallabdjah Contre toute attente, Saddam Hussein est revenu sur l'horrible opération de gazage de la population kurde de Hallabdjah en 1988. Le fait nouveau est l'accusation qu'il dirige contre le régime iranien, désigné par lui comme l'auteur de ce crime abject. Il ira plus loin en affirmant que "les Américains savaient qui était derrière l'opération de Hallabdjah. Ils sont en possession des éléments et des documents qui confirment que l'Iran a frappé à Hallabdjah. Nous étions très occupés par la guerre contre ce pays à cette période, et les forces iraniennes ont bombardé cette ville avec le soutien de certain érudits kurdes". Il n'a pas ménagé le régime des mollahs, auquel il reproche d'avoir semé la "fitna" en Irak, dans l'objectif de parvenir à faire main basse sur le pays. Il prévient son peuple contre l'ingérence de l'Iran dans les affaires intérieures de l'Irak, parce que, assure-t-il, Téhéran n'a jamais perdu l'espoir de s'emparer du sud irakien pour le rattacher à la République islamique chiite perse. Le chantage américain à travers la reconnaissance d'Israël Dans ses révélations à Khalil Doulaïmi, l'avocat irakien agréé par la justice irakienne comme son défenseur, l'ancien président de l'Irak a saisi l'occasion pour rappeler que les Etats-Unis ont exercé une terrible pression sur lui afin qu'il reconnaisse Israël, en contrepartie d'une modification de la position de Washington à l'égard de son régime. "Les Américains m'ont proposé à plusieurs reprises de reconnaître Israël en échange d'une levée de l'embargo", déclare Saddam. "Ils m'ont adressé de nombreuses correspondances et des lettres par le biais de personnalités arabes et étrangères, pour que je reconnaisse l'Etat hébreu, mais j'ai toujours refusé avec force", ajoute-t-il. L'Irak est ma famille À la fin de la rencontre et à la question de l'avocat voulant savoir s'il avait un message à adresser à sa famille, Saddam Hussein dira : "Ma famille ne se limite pas à quatre personnes seulement, Raghda, Halla, Rana et Sadjeda mon épouse, mais c'est l'Irak et la nation dans sa totalité. Qoussaï et Ouddaï et mon petit-fils Mustapha sont tombés en martyrs. Ils se sont battus jusqu'à la dernière minute et ont refusé de fuir. Il ne nous est jamais venu à l'esprit, ne serait-ce qu'un instant, de quitter l'Irak ou de fuir comme des lâches en quête d'une vie facile." K. A.