Se confiant à son avocat américain, Ramsey Clarck, le président irakien déchu raconte depuis sa cellule comment il a été arrêté il y a deux ans par les soldats américains, en précisant qu'il a été victime d'une trahison. Dans son édition d'hier, le quotidien londonien The Sun rapporte par la voix de l'ancien ministre américain de la justice un entretien de Saddam Hussein. Ce dernier revient naturellement sur son arrestation et reconnaît avoir dirigé la rébellion. “Avant sa capture, Saddam bougeait chaque jour dans un endroit différent, organisant l'insurrection”, affirme Ramsey Clarck. Le jour de sa capture, l'ex-maître de Bagdad s'apprêtait à s'enfuir en motocyclette affirme le journal. Quant à sa présence dans le trou, où les militaires américains l'avaient trouvé, Saddam explique : “Je suis sorti par ce trou de la maison où je me cachais. Je suis descendu dans le trou, puis dans le tunnel, puis j'ai perdu conscience. Je pense que j'ai été trahi, j'ai été victime d'un coup monté.” Ces déclarations corroborent ce qu'il avait dit dans un autre entretien accordé à l'hebdomadaire égyptien El Osboâ, par l'intermédiaire de son avocat irakien Khalil Doulaïmi, dont Liberté avait fait une large synthèse à ses lecteurs le 17 mai dernier. Pour rappel, il avait catégoriquement démenti la version américaine, qui affirmait qu'il vivait depuis longtemps dans la fosse où il a été découvert. Ramsey Clarck précise : “Saddam pense qu'il a été gazé dans le tunnel. (...) Il nous a dit qu'il avait probablement passé quelques minutes dans le tunnel, pas des heures ou des jours.” Dans un autre registre, le Sun, qui ne cache pas son hostilité pour la France en particulier et pour l'Europe de manière générale, n'hésite pas à mettre en valeur les déclarations de l'ancien chef de l'Etat irakien sur ses relations avec le président français Jacques Chirac. “Chirac est un de mes vieux amis”, a-t-il dit à ce sujet. Cet entretien, dont la publication coïncide avec la reprise du procès de Saddam Hussein, prévue pour demain, remet au goût du jour sa comparution devant le Haut Tribunal irakien chargé de le juger. L'on se rappelle que le dictateur avait refusé le 5 décembre dernier de revenir devant ses juges et menacer de boycotter le procès à l'avenir. Dans le cas où il maintiendrait sa décision, le procureur général Jaâfar al Moussaoui a été catégorique sur sa présence dans la salle d'audience en déclarant : “Saddam doit être présent au tribunal et s'il refuse de se présenter, nous l'obligerons à venir dans le box des accusés.” Une chose est sûre, l'instance judiciaire, présidée par le magistrat kurde Amine Rizkar, semble déterminée à aller jusqu'au bout de ce procès. Elle prévoit d'entendre lors de l'audience de demain cinq ou six témoins à charge, avant de laisser la place à la quarantaine de témoins de la défense, dont trois ministres du régime déchu et des personnalités détenues par les forces américaines. Enfin, le comité de défense du président irakien déchu Saddam Hussein boycottera la reprise du procès si la protection des avocats n'est pas assurée, a indiqué, hier à Doha, Me Nouaïmi qui assure craindre pour sa vie et celle d'un avocat américain. “Nous allons présenter une lettre officielle au président du tribunal soulignant que le comité de défense n'a pas obtenu, jusqu'à présent, le programme de protection nécessaire pour les avocats et les témoins”, a précisé l'avocat. K. ABDELKAMEL