À l'heure de la crise qui engonce le pays, à la fois sur les plans politique, économique et social, l'ancien chef de gouvernement, Ahmed Benbitour, prévoit des lendemains sombres. Selon son analyse, le pays se dirige droit vers "l'explosion de la rue !". Intervenant hier, en conférencier à l'université d'été du MSP à Alger, l'ancien chef de gouvernement et membre actif de la Cltd, juge, en effet, que "tous les ingrédients sont réunis pour qu'une déflagration sociale se produise dans un avenir très proche". Il explique que la crise précipitée par la chute des prix du pétrole engendrera systématiquement une crise politique et sociale. En d'autres termes, précise-t-il, le pouvoir en place ne pourra plus compter sur la rente pétrolière et, par ricochet, il ne pourra plus continuer à "élargir sa clientèle, ni acheter la paix sociale, encore moins continuer à compter sur les importations pour subvenir aux besoins alimentaires du pays". Il s'agit là, dit-il, de facteurs essentiels ayant permis, jusque-là, la survie du pouvoir. M. Benbitour rappelle que "75% des calories" consommées par les Algériens sont actuellement importées, la facture d'importation ayant augmenté de "plus de 500%". Selon ses estimations, le budget destiné à l'importation a une durée de vie d'à peine quatre ans. "D'ici à quatre ans, l'Etat ne pourra plus payer la facture des importations", a-t-il soutenu. À ce moment-là, prévient-il, le pouvoir ne pourra plus poursuivre la politique sociale à laquelle il doit, en grande partie, sa survie. "Une fois la rente finie, le régime ne pourra plus rien faire, comme ce fut le cas notamment en 2011, lorsqu'il en avait fait usage pour se prémunir de la crise du Printemps arabe. Donc, il y aura inévitablement explosion", tranche l'ancien chef de gouvernement, non sans, toutefois, préconiser quelques dispositions et mesures à entrevoir en vue d'éviter le pire au pays. Il suggère ainsi d'aller vers des réformes profondes qui, dit-il, passent inéluctablement par la refonte du système. Pour lui, "il ne faut surtout pas miser sur le régime en place si l'on veut sortir, même laborieusement, le pays de la crise". Il recommande d'aller vers deux grands axes de réforme : l'un est de réunir les conditions de réussite des mesures à prévoir, notamment avec l'opposition et la société, et l'autre est de mettre en place des mécanismes adéquats pour aller rapidement vers une transition démocratique. Cette transition, précise-t-il, passe par l'organisation d'élections anticipées, sous le contrôle d'une instance indépendante. Il convient de signaler qu'Ahmed Benbitour devait animer cette conférence intitulée "Le discours politique, médiatique et économique", conjointement avec le sociologue Nacer Djabi, qui ne s'est pas présenté. Une absence que les organisateurs expliquent par "un empêchement de dernière minute". Quant à l'absence des représentants du RCD à la cérémonie d'ouverture, avant-hier, de cette université d'été, Abderrezak Makri, que nous avons approché, a tenu à préciser qu'elle était due à "l'enclavement du lieu de la rencontre que les invités du RCD auraient eu du mal à repérer". S'agissant d'Abdallah Djaballah, également absent, la question ne se pose même pas pour les organisateurs, tant est que, rappellent-ils, ce dernier n'a jamais assisté auparavant à cette joute partisane. F.A.