Résumé : Après le dîner, Nawel s'enferme dans sa chambre et se met au balcon. Le quartier vivait. Des badauds ricanaient sous son balcon, et des lumières éclairaient les bâtiments d'en face. Les gens vivaient leur vie. Et elle ? Ses crises d'angoisse remontaient, et elle se surprend à regretter de ne pas avoir demandé ses coordonnées à Nabil. Demain, elle se rendra à la rédaction ! Lorsqu'elle sort de la maison au milieu de la matinée, il y avait un soleil radieux. Nawel portait un joli tailleur printanier, s'était maquillée et s'était même fait faire un brushing chez la coiffeuse du quartier. Elle se sentait bien dans sa peau. C'est curieux, parfois il suffisait de quelques artifices et d'une jolie tenue pour reprendre confiance en soi. Son cartable à la main et son sac sous le bras, elle se dirige vers sa voiture. Nardjesse l'arrête au moment où elle allait monter. La jeune femme revenait du marché et portait un lourd panier. -Bonjour Nawel. Comme tu es jolie ! On dirait une jeune mariée. -La mariée, c'est plutôt toi. Comment cela se présente-t-il donc ? Nardjesse rougit : -Bien. Mustapha est pressé de franchir le pas. Nous allons nous marier dans quelques jours. -Mes sincères félicitations et tous mes vœux de bonheur. -Merci Nawel. Tu assisteras à la petite cérémonie familiale, n'est-ce pas ? Tes conseils m'ont été d'un grand secours, je tiens à ta présence le grand jour. -C'est gentil à toi, Nardjesse, mais je t'assure que tu n'as pas à te formaliser avec moi, je t'ai juste orientée. Le reste est venu tout seul. C'est ton destin qui se manifeste. -J'aimerais que tu rencontres mon futur mari. Nawel sourit : -Dans ce cas-là, je vais essayer d'être parmi vous le grand jour. -J'y tiens beaucoup. Ne me déçois pas, Nawel. La jeune femme lui serre le bras : -Je ne te décevrai pas. Mais je ne pourrais pas trop tarder. Je ne supporte ni les gens ni le bruit. Mes nerfs sont encore malades et fatigués, et je suis toujours sous traitement. -Nous ne serons pas nombreux. Il y aura juste ma famille, Mustapha, sa sœur aînée, et une ou deux amies. Même les voisines, je ne les invite pas. -Bien alors, tout l'honneur sera pour moi. Nardjesse s'éloigne et Nawel démarre. Elle fait un tour en ville comme pour s'imprégner d'un quotidien oublié, puis roule un moment sur l'autoroute avant d'arriver à la rédaction qui se trouvait à l'autre extrémité de la banlieue. Elle est vite repérée par ses anciens collègues. On l'entoure, on lui pose des questions, on lui révèle que son absence n'était pas passée inaperçue, que la nostalgie du bon vieux temps remontait à la surface rien qu'à sa vue. Nawel est heureuse. Elle discute avec les uns, demande des nouvelles des autres, pose des questions, taquine ses collègues de bureau, avant de s'installer derrière sa table de travail et d'allumer son ordinateur. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas humé ces relents de café-tabac, et cette odeur qui caractérisait les rédactions. Elle passe une main caressante sur le clavier de son micro. Chaque matin, la femme de ménage passait son chiffon dessus. Son bureau brillait. Malgré son absence, on l'avait entretenu. Elle ne s'y attendait vraiment pas. -Alors, on est contente d'être là ? C'était le rédacteur en chef qui s'adressait à elle. -Oui. Le monde de la rédaction me manquait. -Tu devrais reprendre ton travail au bureau. Certes pour les lecteurs tu n'as jamais été absente, mais pour nous... Il soupire : -Nawel, tu devrais oublier le passé et reprendre ton travail comme auparavant. Tu as une belle plume et un lectorat fidèle. Jette donc un coup d'œil à tes tiroirs. Elle ouvre un tiroir et constate qu'une pile de courrier avait été gardée là à son intention. Des cartes de vœux, des cartes postales, des lettres... Ses lecteurs lui démontraient leur admiration à leur manière. Il y avait même quelques petits cadeaux de circonstance : peluches, porte-clefs, petits objets souvenirs. -Nous avons même reçu quelques admirateurs qui voulaient te rencontrer, et nous leur avons dit que tu étais en mission. Jusqu'à quand devrons-nous leur cacher la vérité, Nawel ? Elle referme ses tiroirs et le regarde en face : -Je crois que je vais reprendre mon travail à la rédaction. -À la bonne heure. Une sage décision en somme, parce que je pensais justement à te proposer une promotion. N'aimerais-tu pas occuper le deuxième poste de la rédaction ? -Tu veux dire l'ancien poste de Fayçal ? (À suivre) Y. H.