Le campus de Targa Ouzemour à Béjaïa abrite du 10 au 13 mai en cours un colloque international sur les érudits de l'ancienne capitale des Hammadites. Sur les 107 savants répertoriés par El-Ghobrini, l'association écotouristique pour la protection du patrimoine culturel et cultuel de Béjaïa, Les Aiguades, a fait le pari d'évoquer avec une trentaine d'éminents professeurs algériens et étrangers la vie spirituelle et intellectuelle de Sidi Boumediene, considéré comme un pôle du soufisme en Algérie et au Maghreb. Quoique les premières communications laissent entendre que le rayonnement de la pensée de ce professeur et poète du soufisme dépasse, et de loin, les régions citées. Il serait célébré au Machreq, y compris dans la péninsule Arabique jusqu'à Samarkand. Sidi Boumediene, de son nom complet Choaïb Abou Madyan El-Andaloussi, est le fondateur de la principale source initiatique du soufisme du Machreq et de l'Andalousie ; il est né à Séville en 1126 et est décédé à Tlemcen en 1197 après avoir vécu à Béjaïa où il donnera naissance à un fils, Mediène. Il est devenu le saint patron de la ville de Tlemcen où il ne passera, ironie du sort, qu'une nuit. Le sultan Yakoub El-Mansour l'avait réclamé. Mais Sidi Boumediene avait différé le rendez-vous pour y rencontrer d'abord des disciples, venus à sa rencontre, le lendemain, il rendra l'âme. À l'instar de nombreux érudits de l'antique Saldae, il est issu d'une famille andalouse ; il a étudié à Séville puis à Fès. Mais c'est dans les montagnes de l'Atlas qu'il sera initié au soufisme par l'ascète berbère Abu Yaza. Il s'est rendu ensuite au Machreq pour le pèlerinage, et il fera la rencontre de Abdelkader El-Jilani à La Mecque. On apprend que sur le chemin du retour, il fait un détour en Palestine où il participe avec Salaheddine El-Ayoubi (Saladin) à une bataille contre les Croisés ; et c'est lors de cette bataille qu'il perdit une main. Après son pèlerinage et ses études au Moyen-Orient, il s'installe et enseigne à Béjaïa, une capitale alors florissante et lettrée. C'est dans cette ville où ont vécu de nombreux savants, réclamés par Nacer Ibn Hamad pour faire de l'université de Béjaïa un centre de rayonnement ; la preuve, quelque 300 étudiantes y étaient inscrites en ce temps-là. Parmi les savants, venus de Séville l'Andalouse, Sidi Lmoutrif, qui fut cadi, professeur et poète à Béjaïa après l'avoir été à Fès et à Tunis. Mais avec la chute de Nacer Ibn Hamad quelques décennies plus tard, tous les savants avaient dû fuir, notamment avec la liquidation physique de Sidi Abdelhaq dont l'une des mosquées de la ville porte le nom. C'est suite à cela que Sidi Lmoutrif quittera Béjaïa pour aller se réfugier, lui, sa famille ainsi que ses disciples, à Tizi n'Berber sur les hauteurs de cap Aokas. D'autres choisiront d'autres localités et coins reculés de Kabylie ; l'important étant de sauver la vie des leurs et des disciples et surtout les ouvrages qu'ils avaient mis du temps à collecter, à recopier ou à rédiger. M. Ouyougoute