De nouveau la région du Maghreb est sous les feux de la rampe. L'invitation adressée par le président tunisien Ben Ali au premier ministre israélien Sharon pour assister aux travaux du sommet mondial des sociétés de l'information, qui aura lieu en novembre prochain à Tunis, a créé hier une véritable surprise dans le monde arabe. La décision du régime tunisien a pris de court les analystes et les observateurs qui ne s'attendaient pas à cette sortie “tonitruante” et néanmoins “audacieuse” qui rompt avec le style “cachottier et discrétionnaire” des autres régimes arabes dont certains entretiennent, depuis fort longtemps, des relations diplomatiques clandestines avec Tel-Aviv. Les évènements s'accélèrent dans la région du Moyen-orient et ce, depuis le dernier sommet de Charm-Echeikh qui s'est tenu il y a plus de deux semaines, au cours duquel un “premier accord” a été conclu entre Ariel Sharon et Mahmoud Abbas. Accord qui a ouvert la voie aux négociations et qui a permis le dégel de la situation entre Israël et l'autorité palestinienne. Depuis, les regards se sont braqués vers cette région au centre de la tourmente depuis des années. L'assassinat de l'ancien premier ministre libanais, Rafic Hariri, a semé, de nouveau, le doute et la peur après les mises en garde de Washington contre la Syrie, lui ordonnant un retrait immédiat du Liban. Confortées par ces pressions contre le régime de Bachar el Assad, les populations et l'opposition libanaises continuent à manifester dans la rue et à travers les médias contre la présence syrienne au Liban. Dans les territoires occupés, les choses bougent très rapidement, côté palestinien comme israélien. On annonce des concessions de part et d'autre. Concessions que des observateurs considèrent comme des “avancées historiques”. Parallèlement à ce processus, le roi Abdallah II de Jordanie, l'un des organisateurs du sommet de Charm Echeikh, a pris son bâton de pèlerin et a entamé, depuis deux jours, une tournée en Europe pour tenter d'expliquer — plutôt de vendre — aux décideurs européens les résultats de cette rencontre. Après Paris, Londres et Berlin, d'autres capitales accueilleront le souverain hachémite pour discuter de cette question au centre de l'actualité. Les pressions américaines contre le régime de Moubarak ont freiné l'élan et le rôle envahissant et monopoliste de l'Egypte qui veut tout diriger et contrôler dans la région. Situation qui profitera à présent aux voisins. Ces derniers vont tenter de prendre de court Moubarak dont la diplomatie est légèrement “paralysée” par les rappels à l'ordre de l'Administration de George Bush, décidé à imposer l'application des réformes contenues dans le projet du Grand Moyen-Orient (GMO). Ce que certains régimes refusent “timidement” d'admettre, car il constitue un danger pour leur survie. À l'exception de l'Algérie qui a engagé des réformes structurelles depuis des années, et la Jordanie qui a opté pour des changements dans les secteurs économique et politique, ces derniers temps, tous les pays arabes sont concernés par ce processus sur lequel Washington insiste. Récemment, une réunion qui devait regrouper les ministres des AE et ceux des pays du G8 a été reportée à la dernière minute sur injonction du département d'Etat américain, prétextant, diplomatiquement, qu'il est préférable d'attendre les résultats du sommet arabe qui se tiendra à Alger les 22 et 23 mars prochain. Un sommet qui s'annonce décisif et constitue un tournant pour le monde arabe et pour l'avenir de la structure de la ligue arabe, restée sous l'emprise des Egyptiens pendant des années pour ne pas dire depuis sa création. Cette rencontre aura à rétablir l'équilibre des forces dans cette organisation. Comme elle permettra la redistribution des rôles en prévision des futures “échéances onusiennes”. M. A. O.