Un rassemblement en hommage à Amira Merabet, une jeune femme de 34 ans, brûlée vive la semaine dernière à Constantine, a été observé, hier, par une centaine de personnes, sur la placette Saïd-Mekbel, au centre-ville de Béjaïa. La manifestation à laquelle ont pris part plusieurs cadres et militants politiques (RCD, PST, MDS, Jil El-Jadid, Forum socialiste...), des élus locaux et autres acteurs de la société civile, dont la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (Laddh), Amnesty International, le Café littéraire de Béjaïa, a été marquée par la présence de nombreuses femmes, notamment des étudiantes, qui brandissaient des portraits des victimes de la violence barbare, dont ceux d'Amira Merabet, de Razika Cherif, de Katia Bengana, de Nabila Djahnine... D'autres participants à cette action arboraient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : "Une femme, c'est une maman, une sœur, une fille, une épouse", "Basta à la hogra !", "Halte à toute forme de violence contre la femme"... Dans une déclaration lue par une jeune étudiante et distribuée, hier, aux présents à ce rassemblement, le collectif des citoyens de Béjaïa appelle "toute la société et les femmes en particulier, à agir pour ne plus subir", tout en estimant que "l'Etat algérien doit agir en conséquence en mettant en place davantage de mesures visant la protection des femmes et mener à terme l'enquête sur l'affaire d'Amira Merabet, dont l'agresseur, un ex-détenu, est toujours en cavale". Insistant sur la nécessité de voir la femme algérienne "s'auto-organiser autour de son émancipation et de son affranchissement des mœurs patriarcales et la morale dominante", les rédacteurs du même document tiennent à souligner que "tant que les droits sociaux des femmes restent bafoués, il est difficile d'évoluer vers une société émancipée". Pour leur part, les différents intervenants lors de ce rassemblement, ont tenu à dénoncer la violence sous toutes ses formes à l'égard des femmes. "Le sort réservé à la défunte Amira Merabet fait partie d'actes immondes et gravissimes. C'est un crime odieux ! On ne peut pas se taire devant une telle atrocité. Tout le monde est interpellé", lancera à tue-tête Hocine Boumedjane, responsable du Centre de documentation des droits de l'Homme (CDDH) de la wilaya de Béjaïa. Avant d'enchaîner : "Le comble du paradoxe est que la justice algérienne condamne les facebookeurs et les blogueurs, et fait preuve d'indulgence devant les criminels de tout bord !" De son côté, le président du bureau régional du RCD à Béjaïa, Mouloud Deboub, dira que "l'heure est à la mobilisation et à l'organisation. Nous, la famille qui avance, devons agir vite avant qu'il ne soit trop tard. Car, nous avons tendance à perdre peu à peu nos acquis démocratiques, chèrement payés". Pour le représentant du Mouvement démocratique et social (MDS), Rabah Rezgui, "il ne pourrait y avoir de changement démocratique sans l'apport de la femme algérienne qui a payé un lourd tribut aussi bien pendant la Révolution que durant la décennie noire, où beaucoup de victimes sont tombées sous les balles assassines de la horde terroriste islamiste". Enfin, l'ancien militant du MCB, Brahim Tazaghart, éditeur et écrivain en tamazight, que nous avons rencontré, hier, lors de cette manifestation, nous a confié que "lorsqu'une société est violente vis-à-vis des femmes, c'est qu'elle n'a plus de virilité à faire valoir, ni de dignité à défendre. Seuls les peuples forts respectent la femme et la considèrent comme l'égale de l'homme ; un être entier ; un être de bonheur et de paix". Pour rappel, la défunte Amira Merabet a été brûlée vive, la semaine dernière, par un homme, vraisemblablement un repris de justice, qui ne cessait de la harceler dans la ville d'El-Khroub, dans la wilaya de Constantine. KAMAL OUHNIA