La nomination du chef du RND au poste de Premier ministre, en remplacement d'un membre du comité central du FLN, sonne comme un camouflet pour Djamel Ould Abbes. Le FLN a trouvé la parade pour atténuer le choc que lui a provoqué la désignation d'Ahmed Ouyahia à la place d'Abdelmadjid Tebboune à la tête du gouvernement. Une douche froide pour Ould Abbes qui ne cesse d'exhiber la nouvelle Constitution comme sa bible avec des dispositions en faveur du parti majoritaire. Finalement, il ne lui est resté d'argument que le soutien, contre vents et marées, au président de la République, qui est d'ailleurs, rappelle-t-on à l'envi au FLN, président du parti. Etait-il aussi difficile d'arracher une réaction des responsables du parti à la nomination d'Ouyahia, chef du RND, à la place de Tebboune, membre du comité central du FLN ; un responsable du parti dans l'Exécutif en moins, après avoir perdu la majorité absolue à l'Assemblée nationale, en raison du choc et de l'effet surprise provoqués par la décision du président de la République. Cela même s'il est précisé dans le communiqué de la Présidence qu'Abdelaziz Bouteflika a consulté la majorité parlementaire. Son nouveau porte-parole, Sadek Bouguetaya, se consolera en rappelant qu'Ahmed Ouyahia soutient le président de la République et que son parti, le RND, est un allié et partenaire. Une vérité qui cache, cependant, la rivalité entre les deux partis, surtout à l'approche de l'échéance des locales. Les élections locales vont, sans conteste, faire monter la tension entre les deux formations politiques en course pour la suprématie dans toutes les Assemblées élues. Le score satisfaisant du RND aux législatives de mai dernier fait de lui un sérieux concurrent qui risque fort de bousculer le FLN en novembre prochain. Quelle qu'en soit l'issue, Djamel Ould Abbes aura déjà été suffisamment affaibli par les résultats des deux scrutins et de l'intérieur même du parti où des voix contestent sa gestion. Les redresseurs, également, qui ne manqueront pas de monter au créneau encore une fois. Finalement, compte tenu des reproches qui lui sont faits, Ould Abbes a emprunté le même chemin que son prédécesseur, Amar Saâdani, qui réclamait le poste de Premier ministre pour son parti (majoritaire) et jurait qu'il lui reviendra à la faveur de la nouvelle Constitution, jusqu'à ce qu'il soit remplacé à la tête du FLN par Ould Abbes. À son tour, ce dernier prendra la même trajectoire, fort de la confiance placée en lui par le président de la République, la Constitution constamment sous le bras, il la brandira régulièrement pour justifier ses décisions (souvent contestées) en disant qu'elles sont conformes à ses dispositions. Et de reprendre aussi la disposition relative à la nomination du Premier ministre issu du parti majoritaire au Parlement après consultation. Sauf que la nomination-surprise d'Ahmed Ouyahia semble contrarier les pronostics d'Ould Abbes, affairé "personnellement" dans la préparation des élections locales, qui tablait sur le maintien du gouvernement Tebboune au moins jusqu'après cette échéance. Surpris, certainement, par la décision du Président, même s'il avait lui-même confirmé que Tebboune avait été destinataire d'une instruction verbale le rappelant à l'ordre. Et malgré cela, il n'a pas vu le changement venir. Un désaveu ? Probablement. Mais certainement, une preuve que la proximité n'est pas un facteur déterminant dans les choix du Président. Et ce qui est désormais valable pour Tebboune l'est également pour Ould Abbes. Cela d'autant qu'il n'a pas encore réussi à remettre de l'ordre dans le FLN, mission, disait-il, qui lui a été confiée. Enfin, cette tournure des événements démontre que le Président demeure le seul maître du jeu quoique s'évertuent à distiller les zélateurs des partis du pouvoir. Djilali B.