Les économistes restent, à ce propos, sceptiques. La relance d'un nouveau programme de privatisation essuiera, indubitablement, un autre échec similaire à celui des années 1990, prédisent-ils. L'une des épineuses problématiques sur lesquelles doit se pencher sérieusement et dans l'immédiat le gouvernement Ouyahia concerne l'avenir des entreprises publiques déficitaires. L'Exécutif veut se débarrasser impérativement de ce lourd fardeau tout en optant pour des solutions moins coûteuses et sans impact sur la vie socioéconomique du pays. La privatisation semble l'option la plus recevable pour le Premier ministre qui l'a, d'ailleurs, évoquée le mois de juin dernier, lors d'une conférence qu'il a animée en tant que secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND). Il a, à ce propos, parlé de "privatisation d'un nombre d'entreprises publiques dont la situation financière se détériore en raison des problèmes liés au plan de charge et à la gestion". L'on se demande, cependant, si cette démarche va aboutir aux résultats escomptés ? Les économistes restent, à ce propos, sceptiques. La relance d'un nouveau programme de privatisation essuiera indubitablement un autre échec similaire à celui des années 1990, prédisent-ils. Le processus de privatisation de ces entreprises publiques sinistrées aux plans financier et de management, fera face à des contraintes qui empêcheraient sa réussite. L'une des difficultés mises en exergue par l'expert financier, Ferhat Aït Ali, est que ces sociétés doivent être, au préalable, assainies car personne ne pourra les reprendre en l'état. Or, l'Etat est actuellement dans l'incapacité d'adopter de nouvelles mesures financières au profit de ces EPE d'autant plus que celles prises précédemment pour les sauver n'ont pas réglé le problème. Outre le non-paiement des projets réalisés et les créances détenues sur l'Etat à cause de la crise, l'absence de plans de charge précis a mis ces entreprises publiques dans une situation financière précaire. Leur assainissement, décidé par le gouvernement, a toujours consisté à effacer leur découvert. L'Exécutif s'est toujours contenté de soulager ces PME de leurs charges financières et de remettre leurs compteurs à zéro ! Cependant, les temps ont changé. Aujourd'hui, les caisses se sont vidées. Les ressources se sont taries. L'austérité a remplacé l'opulence. Résultats des courses : il n'y a plus d'argent pour redresser la situation de ces entreprises. Le Trésor public ne peut plus voler au secours de ces EPE déstructurées. "Et dans le cas où l'Etat décide de les assainir, les syndicats des travailleurs, demanderont à les reprendre eux-mêmes en usant du droit de préemption", souligne l'économiste. La règle 51/49 qui bloque tout investisseur étranger dans le rachat direct de ces entreprises publiques économiques (EPE) sauf s'il s'associe à des opérateurs algériens, rendra encore plus complexe ce choix gouvernemental. "Quel est cet opérateur étranger qui rachètera une entreprise sinistrée dotée, de surcroît, d'un management obsolète ?", s'interroge le financier. Par ailleurs, les industriels locaux, eux, sont des créateurs d'entreprises, d'actifs et ne sont pas intéressés par le patrimoine public. Celui-ci intéressera plutôt une autre catégorie de privés, eux-mêmes sinistrés, qui songent à la revente de ces actifs ou à en faire des objets de spéculation, une fois acquis, affirme-t-il. Des contraintes bloqueront le processus de privatisation Ce sont, indique M. Aït Ali, des "prédateurs, incapables de se projeter dans une véritable vision industrielle". L'expert relève que le déficit qu'enregistre toute entreprise pour la troisième fois consécutive est synonyme de faillite, conformément aux règlements du code du commerce. "Au-delà de dix déficits, l'assainissement de toute entreprise peut être interprété comme étant un détournement pur et simple !", déplore-t-il. "Il est inadmissible qu'on oblige une société viable, rentable, qui, peut-être, emploie autant sinon plus de personnes que les entreprises publiques, à renflouer sur ses propres fonds, via sa fiscalité, les entreprises publiques", relève-t-il. "Toute entreprise qui n'est pas solvable au plan financier, doit subir le même traitement que toute autre entreprise insolvable, relevant du secteur économique national", déclare-t-il. En termes plus clairs, "il faut lui trouver un repreneur par voie de justice, aux enchères et dans la transparence la plus totale", précise Ferhat Aït Ali. Catégorique, l'économiste pense que les entreprises algériennes ne sont pas privatisables en l'état mais doivent être présentées en revanche, au tribunal des faillites. Le seul moyen pour les privatiser, suggère-t-il, c'est de les présenter chez un juge si l'on veut se conformer aux dispositions du code du commerce. Une chose est certaine, si Ahmed Ouyahia cite dans son discours le programme de privatisation, c'est que, quelque part, la question serait tranchée en haut lieu. Reste à savoir à présent, quels moyens utilisera-t-il, pour réaliser son objectif. B. K.