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Deux décennies de trop
Publié dans Liberté le 18 - 04 - 2005

RESUME : Omar décède deux jours après l'intervention. Sa mort a bouleversé toute sa famille. Djamila est dans un état second. Sa sœur désespère de la ramener à la vie. Mais, en tombant malade, sa fille est hospitalisée. Celle-ci exige la présence de sa mère. Pour sa tante, elle a demandé l'impossible…
Nadia reste donc à l'hôpital et Hakima retourne chez sa sœur. Djamila est encore au lit. Hakima s'en prend encore à elle.
- Ta fille est gravement malade, lui dit-elle. Le pédiatre l'a envoyée à l'hôpital et elle doit rester pour passer d'autres examens. Ils ne comprennent pas d'où vient sa fièvre et pourquoi elle vomit. Est-ce que tu m'entends ?
- Oui. Ils vont lui donner un traitement et elle va vite rentrer.
- Elle en a pour plusieurs jours, lui apprend Hakima. Et le médecin veut quelqu'un pour la garder. Nadia ne veut pas de moi et de personne. Elle tient à ce que ce soit toi qui la gardes. Sinon, elle ne se laissera pas soigner.
- Oh non.
- Nadia doit subir des examens assez douloureux, poursuit Hakima. Est-ce que tu vas l'assister ou rester encore au lit ? Comme si tu étais toi aussi morte ! Comme si tes enfants sont assez grands pour se passer de toi !
Un peu pour confirmer ses dires, le médecin de l'hôpital les appelle. Hakima laisse Djamila répondre. Celle-ci aura à se rendre compte de la gravité de la maladie de sa fille.
- Il faut qu'on lui fasse une ponction lombaire. Elle ne veut pas se laisser faire.
- C'est quoi cet examen ?
- Il nous servira à définir sa maladie. Je crains une méningite mais, sans cet examen, nous ne pouvons pas commencer le traitement, dit le médecin. Puis-je compter sur votre présence ?
- Oui, j'arrive.
C'est le grand soulagement pour ses proches. En acceptant de garder sa fille à l'hôpital, Djamila allait vite reprendre le dessus. Et ils ne se trompent pas. L'examen allait confirmer la crainte du médecin. Nadia a une méningite virale et, pendant plusieurs jours, elle souffrira. Djamila partagera sa souffrance. De nouveau sensible, elle s'intéresse à la meilleure façon de la soulager. L'enfant semble ne pas vouloir guérir. Hakima, qui n'est toujours pas rentrée chez elle, a compris ce que voulait sa nièce.
Elle prend sa sœur, à part, dans le couloir de l'hôpital.
- Tu n'as rien remarqué ? lui demande-t-elle.
- Ses frères lui manquent et quand elle les voit derrière la vitre, elle ne tient plus en place. À leur départ, elle devient triste et silencieuse, dit Djamila. Je dois garder sa main, dans la mienne, même quand elle dort. La nuit, elle parle dans son sommeil.
- Et tu ne comprends pas qu'elle a encore le souvenir de toi, alitée, du temps où tu ne t'occupais plus d'elle et de ses frères ? Elle veut rester malade uniquement parce que ce n'est qu'ainsi qu'elle est sûre d'avoir toute ton attention. Elle a peur de n'être plus rien après, quand elle guérira. Tu comprends Djamila ? Pour rassurer tes enfants, il te faudra reprendre la vie d'avant.
- Mais, c'est ce que je fais, répond Djamila.
- Non, dit Hakima. Pas seulement être à son chevet. Il y a le travail, la maison. Ils ont besoin de retrouver leurs repères. Comme du temps où Omar était encore en vie mais, cette fois, sans lui. Djamila n'attend pas que sa sœur lui conseille de parler à Nadia, elle va le faire sur-le-champ. Elle a le cœur serré à la pensée que sa fille soit terrorisée à l'idée de la “perdre”, elle aussi.
(À suivre)
A. K.
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