Tout indique que le référendum sur la Constitution européenne sonnera le glas pour le Premier ministre de Jacques Chirac, notamment si le “non” se confirme. Considéré comme le successeur probable de Jean-Pierre Raffarin à Matignon, Dominique de Villepin, le ministre français de l'Intérieur a donné l'indice annonçant le départ proche du gouvernement. En affirmant qu'il fallait après le référendum une “politique encore plus volontaire, encore plus audacieuse, encore plus solidaire”, l'ancien chef de la diplomatie française ne laisse aucun doute quant à l'imminence d'un changement de gouvernement dans l'Hexagone. Bien que prenant le soin de ne pas écorcher le Premier ministre en ajoutant que “les hommes ne sont pas en cause”, de Villepin semblait sûr de ce qu'il avançait. Ceci dit, le ministre français de l'Intérieur n'a fait que réitérer ce qu'il avait annoncé dix jours auparavant. “Les conséquences politiques du référendum, nous aurons le temps d'en parler. C'est la décision du président de la République. Mais ce que je peux vous dire, c'est que ce gouvernement est engagé pour défendre l'idée européenne, la conviction qui est la sienne, derrière Jean-Pierre Raffarin, tous unis”, avait-il déclaré sur une chaîne de télévision. Il aura même confié en privé qu'il avait agi avec l'aval de l'Elysée. Cette sortie médiatique a été interprétée comme un signal fort de Jacques Chirac en direction des Français, pour leur montrer qu'il avait bien compris le signe de leur message à travers le “non” qui se dessine pour le projet de Constitution européenne. À travers ce geste annonciateur de changement de gouvernement, le chef de l'Etat français espèrent un renversement de situation sur la question de la Constitution européenne, car la confirmation du rejet sera perçu comme une gifle pour lui. Nombre d'observateurs de la scène politique française n'hésitent pas à imputer le maintien du “non” à l'impopularité grandissante de Jean-Pierre Raffarin. La côte de popularité de ce dernier est descendue sous la barre des trente pour cent d'opinions favorables. Pour certains analystes, l'on se dirige tout droit vers un remake de ce qui s'est passé en 1997 avec Alain Juppé. À l'époque, Jacques Chirac n'avait pas hésité à le sacrifier entre deux tours des élections législatives anticipées, en raison également de son impopularité. Cette situation est profitable au rival annoncé du président français pour les présidentielles de 2007, à savoir le président de l'UMP, Nicolas Sarkozy. Jouant au pompier, ce dernier fait semblant d'appeler à l'apaisement au lieu de verser dans la précipitation. “Il y a un temps pour la campagne, il y a un temps pour les leçons de la campagne”, a-t-il notamment affirmé au sujet de la sortie médiatique de Dominique de Villepin, tout en n'oubliant pas de le clouer au pilori en ajoutant : “Les ministres, c'est fait pour travailler et non pour polémiquer.” Il ne fait aucun doute que Jacques Chirac, auquel on attribue l'intention de postuler à un troisième mandat présidentiel, ne prendra pas le risque de traîner tel un boulet Raffarin, dont l'impopularité aura inévitablement des répercussions négatives sur son mandat actuel, lorsque viendra le temps des bilans. Reste à savoir cependant quel crédit il faut accorder aux déclarations faites hier par Raffarin : “J'ai vérifié hier que la relation de confiance qui me lie au président de la République est telle qu'elle ne saurait passer par un intermédiaire. Je prononce cette phrase ce matin sur RTL en accord avec le président. Les choses sont claires.” K. A.