Le groupe bancaire français Crédit agricole qualifie la politique de monétisation du déficit budgétaire adoptée par l'Algérie de "dangereuse". Dans le dernier numéro de sa publication Perspectives - Pays émergents, le groupe bancaire français indique que "les autorités algériennes viennent de lancer un vaste plan de création monétaire appelé localement ‘financement non conventionnel', s'inspirant des plans de ‘quantitative easing'", plans de relance américain et européen post-crise". Cette initiative, explique le Crédit agricole, "autorise la Banque centrale à créer ex nihilo environ 7 000 milliards de dinars de liquidités en cinq ans (soit environ 56 milliards de dollars et donc un tiers du PIB), afin de financer le déficit budgétaire et, plus modestement, des investissements dans le secteur de l'énergie (Sonelgaz et Sonatrach)". Pour rappel, le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, a indiqué que le montant des emprunts que le Trésor public contractera auprès de la Banque centrale dans le cadre du mécanisme de financement non conventionnel n'est pas encore précisé. Le ministre a assuré que le financement non conventionnel demeurera un outil à caractère exceptionnel, affirmant que le Trésor public ne procédera à l'emprunt direct auprès de la Banque d'Algérie (BA) qu'après épuisement de toutes les ressources traditionnelles qu'il détient. Le groupe bancaire français rappelle que le déficit budgétaire a atteint 17% du PIB en 2016. "Il devrait dépasser 10% en 2017", prévoit le groupe bancaire français, indiquant que "le pays ne souhaite pas emprunter sur les marchés internationaux et a de grandes difficultés à emprunter sur son marché domestique". Le Crédit agricole évoque également des réformes structurelles, "non détaillées à ce stade", qui devraient accompagner la politique de financement non conventionnel. Dans son commentaire, le groupe bancaire français estime que "cette politique de monétisation de son déficit budgétaire s'assimile à une fuite en avant qui sera, bien évidemment, inflationniste, alors que le pays connaît déjà une inflation qui dépasse les 6% (dans un environnement de prix par ailleurs déjà fortement contrôlés et subventionnés)". La dette publique risque également de "déraper de 26% du PIB en 2017 à plus de 60% à horizon 2022". Dans une économie où le cours de la monnaie est fixé au dollar américain et à l'euro, "le regain d'inflation créé devrait rapidement fragiliser le dinar et donc alimenter le marché noir de la devise. Cela pourrait aussi favoriser le développement de l'économie informelle. Une inflation de plus de 30%, un scénario envisageable, pourrait paupériser une partie de la population et donc accentuer les risques d'instabilité sociale", avertit le Crédit agricole, relevant que le dinar a perdu 14% de sa valeur par rapport à l'euro depuis le début de l'année. M. R.