La SG du Parti des travailleurs considère que la situation "dangereuse" actuelle, conséquence de la "crise du régime périmé", "n'est pas inéluctable". Même quelque peu affaiblie, le visage un peu pâle, Louisa Hanoune ne perd rien de sa verve. Ni de son latin lorsqu'il s'agit d'évoquer les politiques adoptées par les gouvernements successifs, notamment sur le plan économique, ces dernières années. Face à une salle archicomble hier à Dar El-Beïda, dans la banlieue Est d'Alger, la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT) a appelé ouvertement à libérer le pays des "partis du pouvoir", allusion au FLN et au RND, qu'elle ne manquera pas de citer par ailleurs, accusés de "mener une politique de destruction", de "régression", de "gérer le pays par la fraude" et "d'adopter une politique généreuse en direction des nouveaux riches". "Il faut libérer le pays du beylicat, des partis qui gèrent par la fraude", a-t-elle lancé. Selon elle, ces partis sont "étrangers à la Révolution". "Ces partis sont étrangers à la Révolution. Le FLN était un front avec une direction. Sa mission s'est terminée en 1962. Ceux qui ont accaparé le sigle après l'indépendance sont des usurpateurs", a-t-elle accusé. Si elle évite soigneusement de citer les responsables des deux partis, Louisa Hanoune n'hésite pas à stigmatiser la politique d'un "gouvernement sans boussole", dit-elle, et de tomber à bras raccourcis sur nombre de ministres dont celui de la Santé, des Transports, de l'Industrie ou encore celui des Finances. "Le gouvernement méprise la majorité du peuple, il ignore le drame des harragas qui attire même des malades et des familles. On est comme les pays africains détruits. Pourtant, nous ne sommes ni pauvres ni endettés. Qui sont les responsables ? Ce sont les partis du pouvoir, ceux qui pratiquent la politique d'austérité." Selon elle, le projet de loi sur la santé, dont le ministre de tutelle est accusé de "grave dérive" après ses propos sur les "femmes qui accouchent trop", "prépare au retour à l'ère de l'indigénat", tandis que l'annonce de "l'ouverture du ciel au privé va porter atteinte à la souveraineté nationale". Aussi, la politique industrielle prépare la "désertification du secteur" et le ministre des Finances veut faire de l'Algérie, non pas une place financière, comme il le proclame, mais une place de "blanchiment d'argent", soutient-elle. "Le projet de loi de finances 2018 accentue la politique d'austérité, c'est une offensive sauvage sur les travailleurs. Les partis du pouvoir, responsables de la régression, tentent de cacher qu'elle est en faveur des nouveaux riches et au détriment de la majorité", martèle-t-elle encore sous un tonnerre d'applaudissements. Des nouveaux riches perçus comme "un danger interne" susceptible d'ouvrir les portes aux dangers externes. Indice ? "La capitale Alger est livrée à la prédation foncière qui s'accompagne de l'accaparement de l'argent public par une oligarchie proche des centres de décision", dénonce-t-elle, non sans relever la destruction du cachet architectural d'Alger, y compris à El-Mouradia, à cause des "prédateurs du foncier qui ne respectent aucune règle". Accusant le RND et le FLN de mener une politique de "destruction", eux qui se sont attaqués aux étudiants dont le tort est de "chercher une issue" car "étant victimes des gouvernements successifs", Louisa Hanoune considère que la situation "dangereuse" actuelle, conséquence de la "crise du régime périmé", "n'est pas inéluctable". "Il est possible de changer les rapports de force, et les solutions existent", estime-t-elle en égrenant les propositions de sortie de crise de son parti dont le recouvrement des impôts et le remboursement des dettes contractées par les riches, et en appelant ses candidats et ses militants à la mobilisation. "Nos élus doivent défendre les acquis et doivent s'opposer à la prédation et à la régression. Notre mission, c'est la guerre contre la misère et le désespoir. Il faut se dresser et résister contre le retour au système de ‘khemmassa' et à l'indigénat. Soyez les sentinelles de l'indépendance et de la République", lance-t-elle en conclusion, à l'adresse des centaines de personnes venues l'acclamer, dans une ambiance festive, sous des accents révolutionnaires, et devant le regard de ses deux amies, assises en premières loges : Zohra Drif Bitat et Khalida Toumi. Karim Kebir