La rencontre de la revendication politique et de la contestation sociale pourrait détoner sur un front social qui déjà promet d'être agité. L'année 2018 s'annonce bouillonnante. Le front social menace d'un embrasement sans précédent. En tout cas, tous les ingrédients sont réunis pour que ce soit le cas. Les balbutiements d'une grogne générale se dessinent. En effet, une foultitude de grèves et autres mouvements de protestations sociales est annoncée pour le début de l'année prochaine. Tandis que beaucoup d'autres mouvements sont déjà enclenchés dans différents secteurs. C'est le cas, entre autres, de la grève ouverte entamée depuis avant-hier 24 décembre, par les médecins résidents de la santé publique, le mouvement des étudiants des Ecoles normales supérieures (ENS) et des Sciences et techniques des activités sportives (Staps), ou encore les débrayages cycliquement observés aussi bien par les universitaires que par les fonctionnaires des collectivités locales. De son côté, le Syndicat algérien des paramédicaux (SAP) annonce une grève cyclique à partir du 8 janvier. Les secteurs de la santé, de l'éducation, de l'enseignement supérieur mais aussi des collectivités locales sont, ainsi, autant de secteurs qui risquent d'être carrément simultanément paralysés dès janvier prochain. Aujourd'hui, la grogne est telle que des appels à des grèves générales sont, en effet, lancés par différents syndicats autonomes. La menace émane particulièrement de l'intersyndicale, regroupant plusieurs syndicats de différents secteurs de la Fonction publique. Cela, sans parler du soulèvement de la jeunesse de Kabylie et d'autres régions berbérophones contre le rejet, par la majorité parlementaire, de l'amendement portant sur la généralisation de tamazight proposé dans le cadre de la loi de finances 2018 par une députée du Parti des travailleurs (PT). La plupart des actions annoncées sont programmées pour après les vacances scolaires. Outre les revendications socioprofessionnelles, les mesures d'austérité dictées par la loi de finances 2018 participent à l'étendue de ce mécontentement social. L'augmentation des prix des produits alimentaires élémentaires, des carburants ou encore des tarifs des transports qui interviendront dès le 1er janvier pour certains et au courant du trimestre pour d'autres, a mobilisé les fonctionnaires et les couches vulnérables des travailleurs qui, déjà, vivent une érosion de leur pouvoir d'achat. Des frémissements politiques peuvent alourdir aussi le climat général. La présidentielle de 2019 pourrait inspirer bien des partis politiques, notamment ceux de l'opposition qui reprendraient les actions de rue, histoire de mobiliser leurs militants et revivifier leurs cercles de sympathisants. D'autant qu'il est légitime qu'ils appuient les causes des populations. Ce qui équivaudrait, inéluctablement, à souffler sur le brasier. La rencontre de la revendication politique et de la contestation sociale pourrait détoner sur un front social qui, déjà, promet d'être agité. Un peu comme à la veille de la présidentielle de 2014, l'approche de l'échéance de 2019, entourée d'un flou total et conjuguée à la crise économique, risque, en effet, d'enflammer davantage le front social. Mais à la différence des années précédentes, le pouvoir ne dispose plus de la manne financière qui lui permettait d'acheter la paix sociale. À moins qu'il ne compte sur la planche à billets. Farid Abdeladim