De l'encadrement du parti et de sa base, Abou Djerra donne l'impression d'avoir franchi une ligne que n'avait jamais osé dépasser son défunt prédécesseur pourtant pas exempt de proximité avec le pouvoir et les cercles de décision. Dans l'action politique, les dégâts collatéraux ne sont pas toujours prévisibles, et le MSP ne sort pas indemne du renforcement des pouvoirs du président de la République qu'on ne soupçonnera pas d'avoir prémédité l'affaiblissement d'un de ses plus fidèles alliés en dépit de son peu de sympathie pour une bonne proportion des partis de l'opposition. Après avoir neutralisé l'aile de la hiérarchie militaire hostile à son deuxième mandat et dont le dernier épisode de cette partie vient de se jouer avec le renvoi du général-major Kamal Aderrahmane, Bouteflika a obtenu sans coup férir la soumission du RND et du FLN alors que le MSP a cru bon de se réserver une petite marge de manœuvre. Même s'il ne s'agit que d'un artifice plus destiné à la consommation de la base militante, cette marge peut toujours se révéler utile en temps de négociations. Avec l'enrôlement d'Abou Djerra au sein d'un gouvernement où il a accepté un poste plutôt symbolique, le MSP a vu sa position s'écrouler sous cette opération de conquête lancée par le président de la République. De l'encadrement du parti et de sa base, Abou Djerra donne l'impression d'avoir franchi une ligne que n'avait jamais osé dépasser son défunt prédécesseur pourtant pas exempt de proximité avec le pouvoir et les cercles de décision. Au maroquin de ministre, Mahfoud Nahnah avait toujours préféré la “abaya” du cheikh afin de garder le respect de ses militants. Bien au contraire, il n'avait pas hésité à affronter le candidat du pouvoir à l'élection présidentielle de 1995. En 1999, il en avait été exclu par un bidouillage législatif spécialement fait pour lui. Ce statut de martyr lui a valu de garder son influence en dépit des ruades de certains cadors du parti à l'instar de Mokri. Le successeur, qui a évolué sous la “abaya” du cheikh, ne semble pas en avoir hérité cette aura. En acceptant un poste au sein du gouvernement, Abou Djerra s'est mis à nu. Il apparaît plus soucieux de sa carrière que de l'avenir de son parti. D'où la révolte qui laisse poindre le syndrome d'une implosion que le Nahda a déjà connu. Y. K.