Résumé :Malika rend visite à Razika et lui apprend que son neveu a l'intention de demander la main de sa fille Yasmina. Cette dernière devrait le suivre pour vivre avec lui sous d'autres cieux. Razika est bouleversée. Razika se met à trembler. Elle aimerait bien voir sa fille mariée et heureuse. Mais à la pensée qu'elle allait devoir se séparer d'elle de sitôt et qu'elle devrait habiter sous d'autres cieux, elle en est bouleversée. -Ton neveu Mouhoub est sûrement un homme instruit, Malika ?, finira-t-elle enfin par demander. -Oui. Et même bien plus instruit que la plupart des jeunes de sa génération. -Alors pourquoi ne cherche-t-il pas ailleurs pour se marier. Il doit bien y avoir des femmes en France, non ! Malika se met à rire. -Certes. Mais s'il voulait une Française, il ne serait pas encore célibataire. Prends-en l'exemple de mon fils Zouhir. Mais Mouhoub veut une femme de son bled. Une femme qui pourra lui rappeler son pays, sa famille, ses origines, et tant mieux d'ailleurs, car une Française l'éloignerait plutôt de tous. -Mais pourquoi précisément ma fille Yasmina ? Malika lance un regard étonné à sa voisine. -Tu ne veux pas la marier ? Razika secoue la tête. -Ce n'est pas ça ! Dieu seul sait si je ne veux pas la voir chez elle heureuse et comblée. Mais je n'aurais jamais pensé qu'un émigré allait demander sa main. -Et alors où est le mal dans tout ça ? -Eh bien, j'avoue que j'aurais aimé la garder plus près de moi. Yasmina a déjà reçu plus d'une demande en mariage. À chaque fois que quelqu'un se présentait, elle arguait du fait qu'il n'était pas instruit, et qu'elle ne voulait pas vivre comme nous autres. Elle a des idées bien bizarres, et je pense que la cause en est cette école de malheur qu'elle fréquente et ces livres qu'elle s'entête à lire des heures durant. Malika se met à rire franchement. -Ah Razika ! Si tu pouvais savoir à quel point je l'envie. J'aurais dû encourager ma fille Fadhéla à fréquenter l'école et à s'initier à la lecture et à l'écriture. Hélas ! Du vivant de son père, ce n'était pas possible, et après la mort de ce dernier, j'avais peur du "qu'en dira-t-on". Je reconnais aujourd'hui que mes idées étaient totalement fausses. Fadhéla va devoir vivre en France, et elle ne sait même pas parler un mot de français. Par contre, Yasmina est bien plus mûre. L'instruction l'a rendue plus accessible à toutes les situations. Elle fera non seulement une bonne épouse, mais aussi une bonne mère, et saura faire face sans trop de mal aux aléas de la vie. Bien sûr, tu aimerais la voir mariée à quelqu'un qui n'habitera pas loin du quartier, comme ça tu pourras lui rende visite et la voir quand bon te semblera. Détrompe-toi donc Razika, Yasmina n'est pas née pour vivre comme nous. Razika se rappelle soudain du serment de son mari. Elle entendait encore la phrase qu'il avait débitée dans sa colère. "Je la marierais au prochain homme qui viendra demander sa main." Et cet homme est là. Il veut épouser Yasmina et l'emmener vivre loin de sa famille. La vénérable femme sentit les larmes lui picoter ses yeux. Il est vrai que sa fille est têtue, et parfois elle était même insolente et insupportable. Mais elle n'avait plus qu'elle maintenant dans cette grande maison. Ses autres enfants étaient tous mariés et avaient fondé leurs propres familles. Yasmina, c'est sa benjamine, sa chouchoute. Elle aurait aimé la garder un peu plus longtemps. Son cœur se serra à l'idée de se séparer d'elle. Elle se reprend tout de même pour répondre à Malika : -Tu veux bien me donner le temps de discuter avec Yasmina ? -Mais bien sûr, ma chère voisine. C'est pour cela d'ailleurs que j'ai préféré m'adresser à toi avant tout. Si ta fille donne son accord, Mouhoub ira demander officiellement sa main à Mohamed avant son retour en Europe. Razika hoche la tête. -Parfait. Je vais lui en parler dès ce soir. Mais si elle refuse, je ne vais pas la bousculer. Et surtout que son père n'en sache rien. -Ne t'inquiète pas sur ce point. Mouhoub peut comprendre très bien nos mœurs, et il est trop sage pour bousculer qui que ce soit dans une affaire aussi sérieuse que le mariage. (À SUIVRE) Y. H.