"Le seul obstacle pour un authentique contrat social rénové est aujourd'hui le pouvoir", accuse le président du RCD, Mohcine Belabbas, dans son discours d'ouverture du 5e congrès du parti. Il y avait d'abord une symbolique inédite : les drapeaux de cinq pays d'Afrique du Nord et du Sahel, en l'occurrence la Tunisie, la Libye, l'Algérie, le Maroc, le Niger et le Mali, et pour une fois dans l'histoire, le drapeau amazigh, alignés ensemble juste derrière le pupitre. Ensuite, la diversité des convives : des leaders de partis, comme Ali Benflis, Karim Tabou ou encore Nouredine Bahbouh, Hamdadouche du MSP, Ghouini d'El-Islah, Sid Ahmed Ghozali, mais aussi un représentant d'un parti libyen, un représentant de l'Azawad, un représentant du mouvement populaire (MP) marocain, celui du parti de l'authenticité et de la modernité (PAM) ou encore le représentant du parti républicain de Tunisie et d'autres acteurs de la société civile et des syndicats autonomes. Enfin, une forte mobilisation de militants puisque pas moins de 1 200 congressistes étaient présents en l'absence du... portrait de Bouteflika. Pour son cinquième congrès, dont les travaux ont commencé hier sous le chapiteau du Hilton, le RCD peut se prévaloir d'avoir réussi son rendez-vous : impulser un nouveau départ au parti dont le mérite a été, sans conteste, "d'avoir lancé les débats les plus décisifs face à l'adversité". Nouveau cap : face à l'impasse dans laquelle s'est englué le pays, un plaidoyer pour le débat sur le projet institutionnel algérien. "Notre conviction est que le débat qui s'impose désormais dans l'agenda national doit porter sur une remise à plat du projet institutionnel algérien", a affirmé le président Mohcine Belabbas dans son allocution d'ouverture dans des accents qui empruntent beaucoup à son prédécesseur à la tête du parti, Saïd Sadi, auquel il a, d'ailleurs, rendu un vibrant hommage. "Pour nous, la refondation institutionnelle, de même que la culture de la gouvernance en vue de l'instauration d'une légitimité démocratique fondée sur le droit, ne peuvent plus être différées. Elles imposent, dans l'urgence et à la lumière des bouleversements qui ont marqué le contexte régional, la formulation et la mise en place de modes de gestion politiques en adéquation avec les aspirations d'une Algérie profondément renouvelée", a-t-il dit. Pour le RCD, l'expérience de "Mazafran", où l'opposition a réussi à se réunir malgré les divergences idéologiques qui minent ses membres, a démontré "qu'un compromis est possible". "Le seul obstacle pour un authentique contrat social rénové est aujourd'hui le pouvoir", accuse Belabbas, même s'il reconnaît, à demi-mot, les limites de cette entreprise lancée en 2014. "Nous demeurons, cependant, convaincus que quelles que soient les formes à mettre en œuvre, la transition démocratique est d'actualité si on veut éviter à notre pays et à notre peuple des épreuves et des aventures qui risquent d'hypothéquer notre avenir (...)", assure-t-il, toutefois. Il considère que le dialogue est le meilleur moyen pour combattre "tous les extrémismes", une allusion à peine voilée au MAK. "La présidentielle n'est pas encore jouée" évoquant la différence d'approche économique affichée récemment par l'Exécutif, le RCD soutient qu'elle est liée à l'enjeu de la présidentielle. "Elle est le produit d'un rapport des forces occultes pour le contrôle de la présidentielle de 2019 par un clan et, donc, du renforcement d'une base clientéliste contre une autre avec le corollaire qui se prolonge pour privilégier des intérêts étrangers identifiés sans lesquels rien n'est possible pour la survie du régime. La guerre médiatique entre les seconds couteaux du sérail, indique simplement que rien ne semble être joué (...)". Avant d'égrener toutes les thématiques et le programme du parti, Mohcine Belabbas rappelle la ligne directrice qui a toujours fondé le RCD. "Nous ne sommes pas des adeptes de ces thèses orientalistes qui glorifient un chef d'Etat omnipotent tout en le dédouanant des échecs de son gouvernement. Nous n'adhérons pas aux visions claniques qui expliquent qu'une fois épuisée par le clan de l'Ouest, l'Algérie doit, mécaniquement, basculer vers le tribalisme de l'Est. Nous ne croyons pas, non plus, aux mystifications qui attendent que l'imam El-Mahdi parle pour exprimer ses opinions. C'est parce que nous avons refusé tout cela que nous sommes aujourd'hui encore debout et écoutés." Suffisant pour enflammer une "salle" acquise, bien partie pour renouveler le bail à l'actuel président. Karim Kebir