Sur la base des enquêtes auprès d'experts, le prix du pétrole pourrait évoluer en 2018, hors situation exceptionnelle de nature géopolitique ou économique, dans la zone des 55 à 70 dollars le baril contre 54 dollars/b en 2017, relève l'IFP Energies nouvelles, qui vient de publier son rapport annuel sur l'évolution des investissements en 2017 dans le domaine des hydrocarbures. Cette perspective de progression du prix, explique l'ancien Institut français de pétrole, s'inscrit dans le cadre du rééquilibrage attendu du marché et d'un contexte économique et financier favorable. "La croissance économique mondiale devrait être solide en 2018 comme en 2017, si l'on en croit les dernières prévisions du FMI ou de l'OCDE", indique le rapport. Cela se traduit par des perspectives de hausse assez soutenue de la demande mondiale, se situant entre 1,3 million de barils par jour, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), et 1,5 million de barils par jour pour l'Opep. "C'est un des facteurs qui explique la pression relative attendue sur le prix", analyse l'IFP Energies nouvelles. Le FMI évoque, toutefois, différents risques financiers ou géopolitiques susceptibles de remettre en cause ces perspectives économiques. "Des corrections baissières sur les marchés financiers, qui impactent en général le prix du pétrole dans le même sens, pourraient en résulter", estime le rapport. Pour l'Institut français de pétrole, le prix du pétrole anticipé pour 2018 reflète comme d'habitude le jeu des forces de marché (ajustement de l'offre et de la demande). Côté offre, deux paramètres restent décisifs : d'une part, la stratégie Opep de gestion de l'offre mise en œuvre en janvier 2017 et prolongée pour l'ensemble de l'année 2018, et, d'autre part, la production américaine de pétrole. Cette production, tirée par celle des huiles de schiste, montre actuellement des signaux contrastés. Après avoir atteint un sommet fin 2017 à 9,8 millions de barils par jour (Mb/j) en progression de 0,8 Mb/j sur un an, elle a connu un début de stagnation depuis fin novembre 2017 avant de repartir à la hausse. "Cette incertitude sur le potentiel à venir est de nature à créer, comme en 2017, une volatilité marquée du prix du pétrole. De façon plus large, l'incertitude globale sur l'offre future, du fait de la faiblesse potentielle des investissements en exploration/production, pourrait conduire à de fortes pressions sur le prix par anticipation de tensions", prévoit l'IFP Energie nouvelles. "Dans ce contexte, les perspectives 2018 sont assez divergentes si l'on se fie aux trois organismes de référence, à savoir l'AIE, l'EIA américain et l'Opep", constate l'institut. L'Opep anticipe en particulier une croissance plus modérée de la production des Etats-Unis. En tenant compte des écarts sur les prévisions de demande, le bilan pétrolier fait apparaître un marché équilibré pour l'AIE et l'EIA en 2018 et au contraire en déficit important d'après l'Opep. Dans ce dernier cas, cela se traduirait par une pression plus forte sur le prix. L'IFP Energies nouvelles indique, par ailleurs, qu'après deux ans de recul brutal (-24% en 2015, -28% en 2016), les investissements mondiaux en exploration-production ont progressé de 4% en 2017 pour s'établir à environ 390 milliards de dollars. La croissance est concentrée en Amérique du Nord, où les investissements bondissent de plus de 30%, alors qu'ils régressent légèrement dans le reste du monde et particulièrement en Europe. Elle est à mettre à l'actif des pétroliers indépendants, dont l'investissement au niveau mondial augmente de 23%, tandis que le budget exploration-production des compagnies nationales (NOC) stagne et que celui des Majors continue à décliner fortement (-16%). En 2018, et sous l'hypothèse d'un prix du baril estimé entre 55 et 70 dollars le baril, les investissements mondiaux d'exploration-production pourraient augmenter de 2 à 6%, avec, là encore, une croissance concentrée sur l'Amérique du Nord. Meziane Rabhi