Cedric villani, député d'En Marche, Sebastien Jumel, du Parti communiste et la famille du disparu ont lancé, de leur côté, un nouvel appel au président Macron, lui demandant de reconnaître comme tel le crime d'Etat qui a été commis sur Maurice Audin. S'agit-il de la preuve que l'Etat français attendait pour reconnaître enfin, dans toute son atrocité, le crime d'Etat qui a été commis sur Maurice Audin, il y a 60 ans. Le journal L'Humanité a publié hier le témoignage glaçant de Jacques Jubier, un ancien caporal de l'armée française, de 82 ans, qui pense avoir enterré le corps du mathématicien, militant communiste et partisan de l'indépendance de l'Algérie, dans un trou de quatre mètres de profondeur, creusé dans une ferme, par des civils algériens auxquels on a bandé les yeux. Jacques Jubier évoque un autre homme, enterré en même temps que Maurice Audin et qui serait, selon son lieutenant de l'époque, le frère de l'ancien président, Ahmed Ben Bella (mais probablement un responsable du FLN). Il décrit des corps noircis et se souvient des mots de ce lieutenant parachutiste, adjoint du général Aussaresses, qui aurait dit : "On les a passés à la lampe à souder, on a insisté sur les mains et les pieds pour éviter qu'on puisse les identifier." Le lieutenant a qualifié une des victimes, Audin en l'occurrence, de "sale communiste". Dans sa confession, Jacques Jubier ne dit pas où le mathématicien a été exactement enterré. Il affirme en revanche, avoir servi en tant que caporal dans la région de Fondouk (actuelle Khemis El-Khechna). Il décrit le quotidien d'appelés comme lui, que la barbarie de la guerre coloniale, a transformé en sauvages, en animaux. L'ancien soldat raconte avec des détails, épouvantables, des massacres, l'usage de la gégène et les fosses communes. Dans le cas de l'affaire Audin, ses révélations apportent davantage de discrédit à la version officielle tenue pendant de nombreuses années et qui consistait à dire que le mathématicien s'était évadé. Cependant, même en l'absence de preuves écrites et de témoignages, la thèse de l'assassinat ne fait pas de doute. En 2014, l'ex-locataire du palais de l'Elysée, Francois Hollande, avait justement adressé une lettre à Josette Audin, la veuve du mathématicien, où il affirme que celui-ci "est mort durant sa détention" mais qu'il était impossible, en l'absence de documents, d'infirmer la thèse de l'évasion. L'actuel president, Emmanuel Macron, sait aussi qu'Audin a été tué. "Il a l'infime conviction qu'il a a été assassiné par l'armée française", a révélé Cedric Villani, député d'En Marche, dans une interview à L'Humanité, en janvier dernier. Hier matin, ce mathématicien proche du chef de l'Etat français, a tenu une conférence de presse, à l'Assemblée nationale, en compagnie du député communiste, Sébastien Jumel, de la veuve et de la fille de Maurice Audin, pour demander de nouveau à Macron de reconnaître la qualité de crime d'Etat dans cette affaire. Les deux parlementaires ont indiqué que le mensonge d'Etat, qui a été entretenu depuis longtemps pour camoufler les horreurs de la guerre d'Algérie, doit cesser. "Je ne suis pas dans une démarche d'inquisition mais de recherche de la vérité", a expliqué Cédric Villani. Selon lui, il existe nécessairement des traces de ce qui s'est passé et il faut ouvrir davantage les archives pour les trouver. "C'est le devoir de l'Etat de tout mettre en marche pour que cela arrive. Il faut faire travailler les historiens et favoriser les échanges entre les deux rives de la Méditerranée, à ce sujet", réclame le député. Il demande aussi à ce que le président Macron s'exprime publiquement sur l'affaire. "On sollicite une parole forte et claire au plus haut niveau de l'Etat", a-t-il ajouté en compagnie de Sebastien Jumel et de Josette Audin. S. L.-K.