Les personnes incarcérées, à l'époque, ont fait part des intimidations qu'elles continuent à subir encore. La visite d'Amnesty International (AI) en Algérie l'a conduite, hier, dans la wilaya de Ghardaïa. Objectif : rencontrer les ex-détenus et leur avocat. “Amnesty International a voulu mieux comprendre ce qui s'est passé à Ghardaïa à l'occasion des évènements qui l'ont secouée, et a également souhaité connaître notre point de vue sur cette question”, nous explique Me Ahmine, avocat des ex-détenus et membre de la ligue algérienne des droits de l'homme (LADDH). Mohamed Djelmouni, ex-détenu et également président du bureau de wilaya de la LADDH, qui a eu à rencontrer la délégation d'AI, hier, en compagnie d'une dizaine d'autres anciens détenus, a indiqué que cette ONG “voulait nous rencontrer en tant qu'acteurs principaux de ces évènements pour qu'on lui explique les facteurs ayant été à l'origine du déclenchement des évènements et leur chronologie, le déroulement du procès et les conditions carcérales”. Djelmouni a fait état à AI de son incompréhension de voir “des personnes qui se trouvaient loin des évènements le jour de leur éclatement et qui se sont trouvées par la suite inculpées”. évoquant le dossier juridique ayant conduit à la condamnation des 42 personnes mises en cause dans ces évènements, Me Ahmine a déclaré avoir expliqué à AI que “le dossier était vide juridiquement parlant et qu'il n'y avait pas de preuves tangibles contre les mis en cause, malgré cela ils ont été condamnés”. La situation actuelle des ex-détenus a également suscité l'intérêt d'Amnesty International, soulignera Mohamed Djelmouni qui n'a pas hésité à dénoncer la persistance des intimidations à leur égard de la part des autorités locales. L'exemple le plus frappant de ces intimidations s'illustre à travers “le harcèlement dont est victime le Dr Fekhar”, insistera notre interlocuteur. “J'ai été jusqu'au jour d'aujourd'hui suspendu de mon poste de médecin exerçant dans le secteur public depuis 15 ans”, expliquera à cet égard le Dr Kameleddine Fekhar, le secrétaire fédéral du front des forces socialistes (FFS) contacté par téléphone. Il a précisé dans la foulée qu'il a été privé de son “salaire” et même de ses “allocations familiales” depuis la date de sa détention jusqu'à ce jour. Indigné au plus haut point, Fekhar relèvera avoir précisé à Amnesty International que cette attitude est “en violation avec les textes de loi régissant la fonction publique”. Pointant un doigt accusateur vers “les autorités locales”, le Dr Fekhar a affirmé que “le directeur de santé de wilaya a demandé ma révocation pure et simple”. Et d'enchaîner : “Après une détention de cinq mois, on m'a jeté à la rue sans travail au moment où l'on parle de réforme pénitentiaire devant préparer les détenus à une vie professionnelle après sa sortie de prison,” ajoute-t-il. Notre interlocuteur notera par ailleurs avoir expliqué les raisons de la révolte à Ghardaïa qui a éclaté pour rappel le 12 octobre 2004. “Ce n'est pas le fait du hasard ! C'est bien l'accumulation des problèmes qui a conduit à chaque fois la population de cette wilaya à s'exprimer par l'émeute”, a-t-il souligné. N. M.