Il y avait davantage de drapeaux amazighs et aussi beaucoup plus de banderoles et de pancartes que d'habitude. Les 47° qu'affichait le thermomètre, hier, à 13h, au centre-ville de Tizi Ouzou, rendaient, tout simplement, impensable qu'il pouvait y avoir une marche, mais c'était compter sans la détermination de l'héroïque peuple du vendredi pour qui il était plutôt impensable d'abdiquer devant le climat et de renoncer à ce 19e rendez-vous avec le destin du pays. "La bhar, la tehwas, el massira koul djemâa" (Ni plage ni détente, on va marcher chaque vendredi), scandait la foule dès le départ de la marche depuis l'entrée du campus Hasnaoua de l'université de Tizi Ouzou à 13h30. Un slogan qui résume, à lui seul, l'état d'esprit et la détermination, toujours inébranlable, de la population à continuer, quelles que soient les conditions, à manifester pour exiger un changement radical du système. Il n'y a, d'ailleurs, pas lieu de s'attarder sur le nombre de manifestants, puisque l'habituelle marée humaine qui envahit le centre-ville de Tizi Ouzou, chaque vendredi, était encore là, au rendez-vous, à scander les mêmes slogans appelant à la libération des manifestants placés sous mandat de dépôt pour port de l'étendard amazigh, et surtout à tailler des croupières au chef de l'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, que tout le monde désigne comme le premier responsable du blocage du processus de transition démocratique comme réclamé par le peuple depuis le 22 février. Il n'y a même pas lieu de s'interroger sur la composante de la marche puisque, malgré les conditions climatiques infernales, il y avait toujours autant de personnes âgées et d'enfants qui, au détriment de leur santé fragile, ont tenu à y participer. Le long de l'itinéraire de la marche qui mène de l'université à la place de L'Olivier, à la sortie ouest de la ville, il y avait, hier, encore davantage de drapeaux amazighs et aussi beaucoup plus de banderoles et de pancartes que d'habitude. "Libérez les détenus d'opinion", "Ni Etat militaire, ni Etat islamique. Oui pour une Algérie plurielle, démocratique et égalitaire", "Pour notre Algérie, nous irons jusqu'au bout quel qu'en soit le prix… Gaïd dégage", "Ils interdisent le port du drapeau amazigh et leurs enfants ont la nationalité française", "Le Kabyle est ton frère, l'Arabe est ton frère, le Chaoui est ton frère, le Mozabite est ton frère, le Targui est ton frère et el-issaba est ton seul ennemi", "Contre toute forme de violence et d'atteinte aux libertés", "Vos enfants coupables en liberté, les innocents en prison", "Le message est clair : tetnehaw gaâ", "Peuple uni, système puni", lit-on parmi les nombreux messages brandis par les manifestants. À noter que la marche d'hier, qui s'est déroulée trois jours seulement après la date anniversaire de l'assassinat de Matoub Lounès, a été marquée par une présence massive de ses portraits et de ses expressions inscrites sur des banderoles.