Après une semaine du début de leurs vacances, ils ont, comme tous les mardis, marché. Les étudiants ont marqué, hier, leur 24e mardi de contestation dans la capitale. Ils ont démontré, une fois de plus, qu'ils ne sortaient pas dans la rue uniquement pour assurer une "simple permanence de mobilisation", en cette période de vacances, mais pour exiger le départ de tous les résidus d'"el-îssaba" et la restitution du pouvoir au peuple. Certes moins nombreux que les grands jours du hirak estudiantin des mois d'avril, de mai ou de juin, les universitaires ont marché en scandant à l'envi les revendications du peuple. Le 24e acte de hirak estudiantin à Alger contre le système politique a été inauguré par l'organisation d'une agora à la place des Martyrs. Les étudiants ont, ensuite, battu le pavé en empruntant le parcours habituel pour rallier la place Maurice-Audin. Ce rassemblement-débat improvisé pour la circonstance, pendant près d'une heure de temps, a été saisi par les manifestants pour décrier les dernières initiatives politiques émanant du pouvoir et s'exprimer sur les derniers événements intervenus sur la scène politico-médiatique. Sous un soleil de plomb avec un taux d'humidité très élevé, les jeunes universitaires qui se sont relayés à la tribune "du jour" ont d'abord développé un discours d'encouragement à l'adresse des étudiants pour continuer à déjouer "la stratégie de division et de fitna" mise en route par les nouveaux tenants du pouvoir. "Il était question aujourd'hui de résister encore à ce régime aux abois. Nous devons rester déterminés et concentrés sur notre sujet qui n'est autre que le départ des serviteurs de ce pouvoir finissant. Nous devons, tôt ou tard, renverser la vapeur en notre faveur pour reprendre l'initiative politique et obtenir nos revendications. Nous sommes l'âme du hirak. Nous ne devons pas nous arrêter à mi-chemin, nous devons continuer le combat pacifique jusqu'à l'instauration d'un véritable Etat de droit", lancera un universitaire, relayé par un autre étudiant qui crie haut et fort : "Nous devons continuer notre combat, le système Bouteflika étant toujours en place. Dieu merci, notre mouvement est en train de se renforcer chaque mardi grâce aux citoyens qui viennent nous prêter main forte." L'idée de création d'une coordination nationale du hirak estudiantin a été remise sur le tapis lors de ce rassemblement. "Nous devons réfléchir à l'organisation de notre mouvement à travers toutes les villes universitaires", ont-ils préconisé. Ce n'est que vers 11h que la marche s'est mise en branle en direction de la place Maurice-Audin où le dispositif sécuritaire habituel était déployé tout au long du parcours. Les marcheurs ont repris pratiquement tous les slogans qui ont été scandés depuis le premier acte de mobilisation, tels que "Yetnahaw gaâ", "Y en a marre des généraux", "À bas houkoumat el montage", "Gaïd Salah dégage", ou encore "Makache el-intikhabet", "Makache el-hiouar maâ el-îssabat", "Libérez l'Algérie", "Etat civil et non militaire". Hier, les étudiants ont fait preuve de beaucoup d'ingéniosité dans la conception des thèmes repris sur les pancartes. Le dernier-né est l'inscription qui traite ironiquement de la revendication des moutons de l'Aïd. "Le mouton de l'Aïd, cette année, revendique, pour sa part, le départ de Bensalah et le départ de Bedoui, sans commentaires !". Les étudiants ont réussi aussi à "expulser" du cortège une dizaine de "barbus en kamis dignes des années 1990" qui ont tenté d'imposer à la foule le nouveau slogan qui traite de la désobéissance civile en déclamant, finalement sans écho, "Rahou djay, rahou djay el-îssiane el-madani". Avant d'atteindre le finish, au jardin Mohamed-Khemisti, les manifestants, qui répétaient haut et fort "Silmiya silmiya", ont été surpris par des policiers qui ont tenté de les empêcher de poursuivre leur marche jusqu'à l'entrée principale de la Fac centrale. Mais les étudiants, qui sont tout aussi déterminés que pacifiques, ont réussi un nouveau test d'adhésion au hirak qui montre bien qu'ils restent totalement attachés aux idéaux du mouvement né au lendemain du 22 février 2019.