Hier, le spectacle était dans la rue et l'installation de la permanence oranaise de l'instance de dialogue et de médiation de Karim Younès pouvait presque passer pour anecdotique. La veille, des appels à protester contre l'ouverture de cette enseigne ont été largement relayés sur les réseaux sociaux et ils ont été apparemment entendus par des irréductibles qui ont débarqué quelques minutes avant la tenue de la conférence de presse animée par Nourredine Djelouli, membre du conseil consultatif des sages et coordinateur du bureau d'Oran. Prévue à 10h, au premier étage du 23, rue Lamartine, la rencontre a été chahutée et les journalistes présents sur place ont été pris à partie par certains esprits surchauffés qui les ont accusés de rouler pour la bande. "Ya sahafa ya chiyatine" (Presse flagorneuse) ou encore "Sahafat el-âar" (Presse de la honte) ont été repris par la foule qui était massée devant le siège de la permanence. Hier, la révolution du sourire n'était qu'un vague souvenir à la vue de quelques surexcités qui ont décidé d'imposer leur loi à tout le monde. En bloquant d'abord l'accès aux lieux, en empêchant des journalistes venus couvrir l'actualité de faire leur job et en s'en prenant verbalement à certains confrères et consœurs de la presse écrite, filmés sous tous les angles comme de vulgaires pestiférés. Une échauffourée s'en est même suivie au sortir de la couverture de la conférence de presse entre un journaliste d'un titre régional et quelques manifestants. N'était l'intervention des plus sages, cette escarmouche aurait pu dégénérer. D'autres manifestants qui ont tenté de s'introduire dans le bureau de la permanence, ont, devant la porte d'entrée, scandé des slogans hostiles au panel en rejetant catégoriquement le dialogue, version Gaïd Salah. Ils étaient toujours sur place au-delà de 13h pour crier leur colère et vilipender les membres de cette instance locale. "Panel à la poubelle", "Makanche hiwar mâa el-îssaba", (Pas de dialogue avec la bande), "Gaïd Salah mayahkamnache, Karim Younès maymatelnache", (Gaïd Salah ne nous gouverne pas, Karim Younès ne nous représente pas) ont encore scandé des manifestants de plus en plus remontés. Quant à la conférence de presse, qui aurait pu virer au vinaigre vu le cours que prenaient les événements, elle s'est limitée essentiellement à la présentation des membres de cette permanence et à ses objectifs. Nourredine Djelouli, l'ancien maire d'Oran, a précisé que la permanence est composée des membres du conseil consultatif des sages ainsi que d'une équipe représentative de la société oranaise constituée de professeurs d'université, de syndicalistes, de hirakistes ainsi que d'opérateurs économiques. Le but étant "d'organiser le dialogue avec les citoyennes et les citoyens de la wilaya d'Oran et des wilayas environnantes". L'occasion a été également saisie pour faire la plaidoirie de l'option de l'élection présidentielle. Un exercice difficile dans le contexte d'hier et celui de tous les vendredis et mardis où l'instance de Karim Younès, qui propose un dialogue monopolistique avec la bénédiction du chef d'état-major de l'ANP, est honnie. Pour nombre d'observateurs du microcosme politique local, le choix même de Nourredine Djelouli et l'adresse physique de cette permanence sont un signal fort du repositionnement de Benflis sur l'échiquier national et la volonté du pouvoir réel d'en faire son homme de paille.