De quoi demain sera-t-il fait ? Telle est la question que les Oranais, sans doute à l'instar de tous les Algériens, se posaient hier mercredi, à la veille d'une élection présidentielle porteuse de toutes les incertitudes. L'inquiétude et le doute étaient d'autant plus importants que les derniers jours ont été marqués par une violente répression des opposants à l'élection. Lundi dernier, au moins cinq manifestants avaient été évacués aux UMC du CHU d'Oran après avoir été tabassés et gazés par des éléments de la police anti-émeute à l'occasion de la marche nocturne et, mardi soir, plus d'une soixantaine de personnes avaient été interpellées, parfois en usant de la violence, avant même que la marche nocturne ne démarre. Et au moment où le défenseur des droits de l'Homme, Kaddour Chouicha, était condamné à un an de prison ferme et mis sous mandat de dépôt, la place du 1er-Novembre, lieu hautement symbolique du hirak depuis février, était bouclée par un impressionnant dispositif de sécurité qui conférait à Oran des allures d'état de siège. Ces événements conjugués aux informations faisant état d'un durcissement sécuritaire dans les wilayas avoisinantes, telles que Sidi Bel-Abbès, Mostaganem et Tlemcen, confirmait la volonté des autorités à maintenir le scrutin et à réprimer toute voix discordante. Hier, dans la capitale de l'Ouest, l'expression "Allah ijib el-kheir" bruissait tant l'incertitude et l'inquiétude oppressaient la poitrine des Oranais. "Pourvu qu'il n'y ait pas de dérapages et que toutes les parties fassent preuve de retenue", déclare un hirakiste à l'occasion de la présentation (encore une !) d'un jeune devant le procureur de la République, au tribunal de Cité Djamel, pour attroupement et incitation à attroupement. L'étudiant faisait partie de la cinquantaine de manifestants interpellés la veille à la suite de la marche nocturne avortée. Autre signe d'inquiétude des Oranais : la ruée sur les produits alimentaires. Beaucoup de ménages ont, en effet, pris la précaution de s'approvisionner en produits de première nécessité afin de parer à toute éventualité. "Je suis presque certaine qu'il n'y aura pas de pénurie au lendemain du vote, mais je préfère quand même prendre mes dispositions", a estimé une mère de famille qui a déjà fait ses provisions durant la semaine.