Les manifestants ont opposé un niet non négociable à l'offre de Tebboune, l'assimilant à une "discussion entre le loup et sa queue". Les Algérois étaient fortement mobilisés, hier, à l'occasion du 44e vendredi du mouvement citoyen que connaît le pays depuis le 22 février dernier. La mobilisation d'hier coïncidait avec le premier vendredi post-investiture d'Abdelmadjid Tebboune et le deuxième après l'élection présidentielle du 12 décembre dernier. L'ampleur de la manifestation d'hier s'explique par le rejet de l'offre de dialogue proposée par Abdelmadjid Tebboune dès sa première conférence de presse post-élection, où il avait tendu la main au hirak en s'engageant à satisfaire l'ensemble de ses revendications. Face à l'offre d'Abdelmadjid Tebboune, les manifestants ont opposé un niet non négociable, assimilant ce dialogue à une espèce de "discussion entre le loup et sa queue". "Le dialogue ne nous intéresse pas et ne nous concerne pas", scandent les manifestants qui, dès 11h, commençaient déjà à se rassembler par petits groupes à la rue Ferhat-Boussad (ex-Meissonier) et autour de la mosquée Errahma. Comme à l'accoutumée, la fin de la prière a donné lieu à une marche grandiose ; la rue Didouche-Mourad prenait aussitôt ses couleurs habituelles du vendredi, alors que les cortèges habituels en provenance de Mohamed-Belouizdad (Belcourt) et de Bab El-Oued arrivaient telle une déferlante géante que même la rue Hassiba-Ben Bouali et le boulevard Zighoud-Youcef peinent à contenir. Ce sont des centaines de milliers de personnes qui ont marché hier à Alger, au lendemain de l'investiture d'Abdelmadjid Tebboune, pour dénoncer un scrutin "truqué" et "une volonté d'imposer le fait accompli". "Pas de dialogue avec l'îssaba (mafia)", scandent les manifestants, qui ont été notamment boostés par cette élection du 12 décembre dernier qui, de l'avis de nombre d'entre eux, s'apparentait à un passage en force contre la volonté des millions d'Algériens qui investissent les rues chaque semaine. "Nos représentants sont dans vos prisons", lit-on encore sur une pancarte d'un des manifestants. Ou encore : "Le hirak ne dialogue pas, nos revendications sont claires, nous attendons leur concrétisation." Vers 15h, les deux vagues en provenance de Bab El-Oued et de Belcourt se sont rejointes à la place de la Grande-Poste, pour ne former qu'un front uni contre les résultats du dernier scrutin. Les manifestants étaient plus nombreux que vendredi dernier, le premier post-élection. C'est parce qu'aussi le mouvement bouclera, demain, ses dix mois de mobilisation, alors qu'aucune ébauche de sortie de crise ne se profile, quand bien même les fervents défenseurs de la solution par l'urne auraient réussi à organiser le scrutin. La libération des détenus, leur solidarité avec les blessés de la semaine dernière, le rejet du dialogue et des résultats du scrutin revenaient hier comme un leitmotiv dans les slogans scandés par les Algérois. "Allah Akbar, nous n'avons pas voté", scandaient les manifestants sans relâche, alors que les résultats annoncés devaient se traduire au moins par une baisse de mobilisation. Bien au contraire, ce 44e vendredi de cette révolution aura été marqué par un net regain de mobilisation.