"En cas de crise durable, et compte tenu de la situation d'excédents du marché au 1er semestre,le prix pourrait se maintenir en dessous de sa zone d'équilibre (60 à 70 dollars) vers des niveaux assez bas pour rééquilibrer le marché", indique l'IFP. La réaction récente des marchés financiers et pétroliers au coronavirus met en lumière des inquiétudes réelles concernant la croissance économique qui se traduisent par des baisses marquées survenues le 27 et le 30 janvier derniers, relève l'IFP Energies nouvelles (Ifpen) dans un rapport sur la situation du marché pétrolier publié, lundi dernier, sous le titre "Marché pétrolier : les Etats-Unis mènent le bal, l'Opep+ s'adapte". Le prix du Brent, déjà en recul après le 6 janvier avec l'apaisement des tensions géopolitiques, est ainsi passé sous la barre des 60 dollars le baril le 24 janvier dernier pour évoluer depuis entre 58 et 59 dollars le baril, constate le document. Selon l'Ifpen, il y a deux conséquences envisageables. La première concerne la Chine en termes de croissance économique et de demande pétrolière en raison du confinement d'une partie de la population. La seconde concerne les déplacements internationaux. "En cas de crise durable, et compte tenu de la situation d'excédents du marché au 1er semestre, le prix pourrait se maintenir en dessous de sa zone d'équilibre (60 à 70 dollars le baril) vers des niveaux assez bas pour rééquilibrer le marché", indique l'Institut français du pétrole. Pour autant, ce scénario reste très incertain, estime l'Ifpen pour qui, le premier bouleversement envisagé pourrait venir du côté de la production américaine. Les cours restent, en effet, largement dictés par l'évolution de la production d'huile de schiste aux Etats-Unis. L'Ifpen fait remarquer que la baisse de l'activité de forage aux Etats-Unis depuis octobre 2018 a suscité "des interrogations sur le ralentissement plus ou moins important de la croissance de la production future", qu'il convient, toutefois, de nuancer. Car si le nombre de forages diminue, la productivité par puits augmente. Selon l'Ifpen, les modèles fondés sur l'activité de forage et le niveau de productivité des puits ne permettent pas de trancher entre hausse significative ou recul modéré de l'offre pour ce qui concerne les huiles de schiste. En ce qui concerne l'Opep+, plusieurs interrogations demeurent pour les pays en proie à des sanctions (Iran) ou soumis à des tensions intérieures susceptibles de réduire leur production. "C'est en particulier le cas de l'Irak qui, avec un total de 4,7 millions de barils par jour, constitue le plus important producteur après l'Arabie saoudite et la Russie", indique l'Institut français. "Après l'élection présidentielle du 12 décembre dernier en Algérie, la situation est également incertaine pour ce pays producteur toutefois modeste de pétrole (1 million de barils par jour), mais plus significatif pour le gaz naturel", ajoute-t-il. C'est également le cas en Libye. L'Ifpen note que le prix du Brent a évolué, en moyenne annuelle, entre 40 et 100 dollars le baril depuis 2014 et entre 55 et 65 dollars le baril depuis 2017. "Les anticipations de prix pour 2020 et 2021 se situent plutôt dans cette dernière zone, comprises entre 52 et 80 dollars le baril. La moyenne de 64 dollars le baril est équivalente à celle de 2019", prévoit l'Institut français, précisant qu'il est "difficile de trancher entre ces extrêmes, reflet d'un large éventail de possibles". Pour l'Ifpen, "cette moyenne est néanmoins en cohérence avec le recul des coûts de production survenu depuis 2014, ce qui explique que l'on soit sorti de la zone des 100 dollars le baril, niveau d'équilibre du marché pétrolier de 2011 à mi-2014". Les analyses récentes de Rystad évoquent des coûts de production maximum de 70 dollars le baril, "si l'on exclut les sables bitumineux (70 à 90 dollars le baril)". Un prix de 60 à 70 dollars le baril, estime l'Ifpen, est donc en phase avec les coûts de production actuellement les plus élevés, permettant d'assurer la rentabilité des projets associés. La zone plus large des 50 à 80 dollars le baril, précise l'Institut français, tient compte des aléas de nature économique, financière ou géopolitique qui pourraient faire sortir le prix du pétrole de ses valeurs en ligne avec les coûts de production.