Une étude portant pour titre “Analyse des impacts macroéconomiques et sectoriels de l'accord d'association entre l'Algérie et l'Union européenne” relève que les autorités économiques disposent d'un délai important pour mettre en place la politique et les instruments qui permettraient à l'économie algérienne de surmonter cet écueil. L'entrée en vigueur de l'accord d'association le 1er septembre prochain entre l'Algérie et l'union européenne inquiète les opérateurs économiques et les syndicats. “L'arrangement fragilisera l'outil de production”, avertissent-ils. L'entreprise algérienne, aujourd'hui, est incapable de supporter la concurrence induite par le démantèlement tarifaire. “Du coup, la facture risque d'être salée”, parce que l'arrangement, estiment les chefs d'entreprises, a été mal négocié. M. Réda Hamiani, vice-président du Forum des chefs d'entreprise, avait tiré la sonnette d'alarme. “90% des entreprises algériennes fabriquent des produits qui ne répondent pas aux normes internationales”, estiment-ils. Le salut de ces entreprises ne pourrait venir que de leur mise à niveau. Sur ce point, il n'y a pas de quoi pavoiser. Le bilan est très maigre. Depuis la mise en route du programme d'aide à la mise à niveau des entreprises en 2002 jusqu'à fin octobre 2004, seuls 293 dossiers ont été introduits par les entreprises. Le ministère de l'industrie évoque 83 dossiers soumis pour la phase de mise à niveau (49 entreprises publiques et 34 privées). Le traitement a concerné 73 entreprises dont 69 ont été retenues pour bénéficier de l'aide du Fonds de promotion de compétitivité industrielle, 64 au titre du plan de mise à niveau et 5 limitées à l'étude de diagnostic. Le processus connaît un grand retard dû au fait qu'à partir de l'an prochain, les Pme qui constituent l'essentiel du tissu industriel algérien seront confrontées à une protection tarifaire beaucoup moins forte au profit des produits importés. 19 entreprises seulement ont atteint un taux de réalisation de plan de mise à niveau ne dépassant pas 30%. 9 sociétés enregistrent un taux de moins de 10%. Le chemin est encore trop long quand on sait qu'en Tunisie, 2 200 entreprises ont été mises à niveau. De larges concessions ont été accordées à l'union européenne Les concessions accordées aux deux parties semblent être à l'avantage de l'union européenne. C'est du moins la conviction de certains opérateurs économiques et de la fédération nationale des travailleurs de l'agroalimentaire affiliée à l'Ugta. Les cas des produits céréaliers, des pommes de terre, des confitures et du sucre blanc ont été cités. Pour les céréales, on parle d'octroi d'un contingent de 400 000 tonnes de blé à l'union européenne en échange d'un contingent de 4 000 tonnes de produits céréaliers transformés en Algérie dont 2 000 tonnes de couscous et 2 000 tonnes de pâtes alimentaires. Concernant les pommes de terre, l'arrangement prévoit l'octroi à l'Algérie d'un contingent de 5 000 tonnes de pomme de terre fraîche à exporter entre le 1er janvier et le 31 mars. en contrepartie, l'union européenne bénéficie d'un quota de 45 000 tonnes de semences représentant en valeur plus de 600 000 tonnes de pomme de terre fraîche. Par ailleurs, l'UE bénéficie d'une facilité pour l'exportation de quantités illimitées de confitures ; en échange, l'Algérie obtient un quota de 2 000 tonnes de confitures d'agrumes et 200 tonnes de confitures tous fruits confondus, avec comme condition de ne pas dépasser une teneur en sucre de 13%. L'Union européenne accorde à l'Algérie des facilités pour l'exportation du whisky, du cognac, du brandy, du calvados et des fruits tropicaux sachant que notre pays ne produit pas ce type de marchandises. L'Union européenne a obtenu dans le cadre de l'accord d'association un contingent d'exportation vers l'Algérie de 150000 tonnes de sucre blanc en exonération totale des droits de douane. L'Ugta avertit que l'entreprise Enasucre est menacée d'effondrement. Cette situation se caractérise, explique l'Ugta, par une concurrence déloyale d'un produit européen subventionné à 70% de sa valeur à l'exportation (plus de 400 euros la tonne), l'exonération totale de droits de douane de ce produit sans contrepartie pour la production nationale et l'imposition de sa matière première, le sucre roux, à hauteur de 5% de droits de douane. 58 020 emplois menacés Une étude portant pour titre “Analyse des impacts macroéconomiques et sectoriels de l'accord d'association entre l'Algérie et l'Union européenne”, réalisée par un bureau d'études étranger, Sema-Schlumberger, pour le compte de l'administration centrale algérienne relève qu'une application immédiate du démantèlement tarifaire aurait un effet dépressif certain sur la production sectorielle et sur l'emploi. L'impact global en terme d'emploi industriel est assez significatif, puisqu'il touche une perte totale estimée à 58 020 emplois ; même si cette estimation est une simple extrapolation de la diminution de la masse salariale, elle reste préoccupante par son ampleur. Malgré ces nombreuses limites que, dans certains cas, les auteurs eux-mêmes n'omettent pas de signaler, l'étude reste déjà en soi une opportunité de se pencher sérieusement sur les implications prévisibles sur l'économie algérienne de l'application d'un accord d'association déjà conclu. Dans cet esprit, il serait souhaitable que le résultat de cette étude soit non seulement rendu public, mais qu'il puisse donner lieu à un débat ouvert. L'étude souligne tout de même que les autorités économiques disposent d'un délai important pour mettre en place la politique et les instruments qui permettraient à l'économie algérienne de surmonter cet écueil. C'est, depuis longtemps, la revendication principale des entreprises. Meziane rabhi