Le prix du pétrole s'établit en moyenne mensuelle pour les premières cotations du mois d'avril autour de 21 dollars le baril, contre 32 le baril en mars et près du triple en janvier dernier (63 dollars le baril). "Ces niveaux de prix n'ont jamais été atteints au cours de ces dernières années ni au plus fort de la crise de 2008-2009, ni après la guerre des prix de fin 2014 à 2016", estime IFP Energies nouvelles (Ifpen), dans son analyse hebdomadaire de la situation des marchés pétroliers, publiée jeudi. Sur la base des prix à terme, indique l'institut de recherche français, "la moyenne 2020 est estimée à 38 dollars le baril actuellement", un niveau historiquement bas. "Ces niveaux traduisent l'ampleur des effets de la crise en cours entraînant une baisse historique de la demande que les producteurs doivent désormais subir ou gérer (via l'Opep++ = Opep+ avec le soutien des Etats-Unis, des producteurs africains…)", souligne l'Ifpen. L'institut français du pétrole évoque une baisse historique de la consommation mondiale de pétrole en 2020. "Dans ce contexte, une simulation par zone a été faite tenant compte du début spécifique du confinement par zone retenue (Chine, non-OCDE hors Chine, trois zones OCDE), d'une durée de deux mois de confinement, et d'un impact de 30 à 50% sur la demande dans le mois de confinement total", indique l'Ifpen. Le scénario table également sur une reprise rapide après déconfinement. Sur la base de ces hypothèses, la demande serait en retrait de 23 millions de barils par jour en avril, de 32 millions de barils par jour en mai et de 21 millions de barils par jour en juin. Elle remonterait autour de 90 millions de barils par jour en juillet. "Rystad Energy pour sa part, table désormais sur un niveau de retrait similaire (-9,4 millions de barils par jour) ainsi que l'AIE (-9,3 millions de barils par jour)", relève l'institut de recherche français. Dans son tableau de bord pétrolier, l'Ifpen note que l'engagement pris par l'Opep+ "correspond à une baisse réelle de 7,5 millions de baril par jour (hors Iran, Libye, Venezuela)" par rapport au niveau de février 2020. Cet effort devrait être soutenu par des pays hors Opep+ dont la Norvège, le Canada ou le Brésil. Aux Etats-Unis, l'AIE prévoit que la production de pétrole brut atteindra en moyenne 11,8 millions de barils par jour en 2020, en baisse de 0,5 millions de baril par jour par rapport à 2019. L'Ifpen estime que les excédents cumulés de pétrole entre avril et juin 2020 pourraient avoisiner 1,4 milliard de barils au niveau mondial. "Cela signifie que les capacités de stockage disponibles, estimées entre 0,9 et 1,8 milliard de barils, seraient soit insuffisantes, soit saturées", précise l'organisme. Si les capacités de stockage devaient être fortement mobilisées, indique l'Ifpen, cela se traduirait d'une part par une baisse sensible des prix en dessous des coûts opératoires et d'autre part par un "contango" renforcé pour favoriser les stockages à coûts élevés. "Une fois l'équilibre atteint, le prix pourrait revenir dans sa zone d'équilibre légèrement supérieure à 30 dollars le baril, niveau suffisant pour couvrir les coûts opératoires. Il ne pourra revenir vers la zone d'équilibre de long terme (60/70 dollars le baril), favorisant les investissements, qu'une fois l'excédent du marché résorbé", ajoute l'organisme français. Ce dernier soutient que les prix du pétrole pourraient à nouveau connaître une baisse durable sur un à trois ans. "C'est pourquoi les compagnies pétrolières ont annoncé des ajustements à la baisse de leurs investissements (-20 et jusqu'à -50% dans les ‘shale oil') et dépenses opératoires, de leur politique de rachat d'actions ou du niveau de dividendes" souligne l'institut de recherche français.