Quand le politique blanchit le fascisme, les textes se referment sur leur obsolescence. Faut-il donc se résigner à la fatalité ? La sonnette d'alarme a beau être tirée, l'Université demeure source de grande inquiétude. Le seuil de tolérance a, en tout cas, été franchi mardi dernier à Tlemcen. Un étudiant, âgé de vingt ans, a été tué par d'autres étudiants après une assemblée générale élective du comité de la cité Bouhenak. Mardi encore, des affrontements entre (étudiants) militants ont fait sept blessés à Oran pour, là aussi, une histoire d'élections. À Blida, un fanatique islamiste a manqué de peu de poignarder deux camarades : il leur reprochait leur comportement “exagérément cool”. À la cité universitaire de Bouraoui, à Alger, des affrontements, provoqués par des islamistes de l'Ugel, avaient fait sept blessés parmi les membres d'une association estudiantine agréée. “Je gère un volcan”, nous disait ce jour-là le directeur de cette cité. Il tempêtait surtout contre l'absence de tout instrument juridique réprimant les dérives dans les campus. Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Rachid Harraoubia, décidait, vingt jours plus tard, de limoger le directeur de l'Office national des œuvres universitaires (Onou). Saïd Saghour était le troisième dirigeant de l'Office en moins de deux ans. Et Saïd Saghour déclarait, dans un entretien au Jeune Indépendant, en marge de la conférence des recteurs d'université, le 14 décembre dernier : “Parfois, la situation est incontrôlable. Nous n'avons aucune prérogative pour sanctionner les organisations (estudiantines). Le règlement intérieur des cités, édicté du temps où il n'y avait, à l'Université, qu'une seule organisation, est dépassé : nous sommes passés de 120 000 étudiants, à cette époque, à 315 000 maintenant.” Oui, la situation est incontrôlable. De précédent en précédent, l'Université algérienne a fini par s'engluer dans un état de rapport de forces largement dominé par les islamistes. Majoritaires, disciplinés, ces étudiants veillent, grâce à une structuration impressionnante, à maintenir leur hégémonie. Ils dictent ainsi leurs lois et ne se lassent jamais d'user de la violence comme ce fut le cas en 1981 à Ben Aknoun avec l'assassinat de Kamel Amzal. Pendant ce temps, la législation universitaire a été incapable d'évoluer au point de pouvoir réprimer cette violence. Aujourd'hui, la concorde a considérablement renversé l'ordre des choses : les démocrates vont bientôt se cacher pour mourir car le politique a blanchi le fascisme. Rachid Harraoubia a par ailleurs appelé, dans un communiqué diffusé jeudi dernier, les responsables des associations universitaires à faire preuve de sagesse et de pondération. L. B.