Alors que les avocats de la défense s'attendaient à un nouveau report du procès du cyberjournaliste Saïd Boudour et du lanceur d'alerte Noureddine Tounsi, en raison de l'absence de ce dernier (il se trouve en détention dans le cadre d'un autre dossier), le tribunal correctionnel de Fellaoucène a surpris son monde en décidant de juger l'affaire. "Nous avons demandé un ajournement pour l'extraction de Noureddine Tounsi, mais le juge a rejeté notre requête et l'affaire a été examinée en l'absence des prévenus", a regretté Me Farid Khemisti, non sans dénoncer une violation des procédures légales. "Les conditions prévues par le législateur pour le déroulement d'un procès équitable n'étaient pas réunies. Un des prévenus n'avait pas été extrait, le procès devait être ajourné", a-t-il encore expliqué, en déplorant une transgression des lois. Le procureur de la République a ainsi requis la peine de deux ans de prison ferme assortie d'une amende de 100 000 DA sans que les avocats présents puissent plaider en l'absence des prévenus. Le verdict a été mis en délibéré pour le 17 novembre prochain. Il est utile de signaler que le procès avait déjà été reporté le 15 septembre dernier en raison, justement, de l'absence de Noureddine Tounsi que le parquet n'avait pas extrait en vue de l'audience. Saïd Boudour et Noureddine Tounsi sont poursuivis pour "menaces et tentative d'extorsion de fonds" dans le cadre d'une affaire de chantage présumée contre un particulier. Saïd Boudour doit également répondre d'"outrage aux institutions de l'Etat". Les faits de cette affaire remontent à octobre 2019, lorsque les deux hommes ont été arrêtés à la suite d'une plainte pour chantage portée par un particulier résidant à Sénia. Déférés devant l'ex-tribunal de Cité Djamel, ils ont été remis en liberté par le magistrat instructeur, estimant qu'ils présentaient suffisamment de garanties de représentation. Le procureur de la République a fait appel devant la chambre d'accusation qui a annulé la décision et ordonné la mise sous-mandat de dépôt de Boudour (mandat jamais exécuté) et la mise sous contrôle judiciaire de Tounsi. En mars 2020, la même chambre a prononcé le non-lieu concernant les chefs d'accusation d'"atteinte au moral des troupes", de "diffamation" et d'"atteinte à l'intégrité du territoire national et à l'unité nationale" retenus contre Saïd Boudour, renvoyant ainsi l'affaire devant le tribunal correctionnel. Rappelons, enfin, que Noureddine Tounsi avait été interpellé le 21 septembre et placé en détention deux jours plus tard par le magistrat instructeur près le tribunal correctionnel de Fellaoucene. Il est poursuivi pour intelligence avec l'étranger, divulgation de secrets professionnels et outrages et violences à fonctionnaires et institutions de l'Etat.