Aucune information n'était disponible hier sur le bilan humain ou des dégâts à Asmara, capitale d'un des Etats les plus fermés au monde, dirigé d'une main de fer par Issaias Afeworki depuis son indépendance de l'Ethiopie en 1993. Le risque d'une régionalisation du conflit dans le Tigré éthiopien n'est pas à écarter après le bombardement de l'aéroport d'Asmara, en Erythrée voisine, accusée par les dissidents tigréens de soutien à Addis-Abeba. Le chef de la dissidence tigrée a reconnu en effet hier que son mouvement est à l'origine des tirs de roquettes qui se sont abattues samedi à Asmara, la capitale de l'Erythrée avec laquelle l'actuel Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a conclu la paix en 2018, ce qui lui a valu d'être nominé Prix Nobel de la paix en 2019. Cette escalade de la violence en dehors des frontières risque de dégénérer en conflit régional, suite à l'envoi le 4 novembre par Abiy Ahmed de troupes dans la région du Tigré, sous contrôle du Front de libération des Peuples du Tigré (TPLF). Le TPLF a accusé ces derniers jours le pouvoir d'Asmara, son ennemi juré, de laisser l'armée éthiopienne utiliser son territoire – bordant toute la frontière Nord du Tigré – pour y faire passer ses troupes ou décoller ses avions, et affirme que l'armée érythréenne participe directement aux combats au sol au Tigré. Hier, le président du Tigré, Debretsion Gebremichael, a revendiqué le tir des roquettes qui ont frappé la veille au soir, selon des diplomates basés à Addis-Abeba, les abords de l'aéroport d'Asmara. Aucune information n'était disponible hier sur le bilan humain ou des dégâts à Asmara, capitale d'un des Etats les plus fermés au monde, dirigé d'une main de fer par Issaias Afeworki depuis son indépendance de l'Ethiopie en 1993. "Les forces éthiopiennes utilisent aussi l'aéroport d'Asmara" ce qui en fait "une cible légitime", a justifié hier M. Debretsion, répétant que les forces du TPLF "combattent les forces érythréennes depuis quelques jours sur plusieurs fronts" au Tigré. Hier, des médias d'Etat ont fait état de la prise d'Alamata, localité du sud-est du Tigré, à 180 km de route au sud de la capitale régionale Mekele. Samedi, le TPLF avait déjà revendiqué le tir de "missiles" contre deux aéroports de la région voisine de l'Amhara, également utilisés selon lui par l'aviation militaire éthiopienne. Les tirs vers l'Amhara et l'Erythrée montrent la capacité du TPLF à porter les hostilités loin de son fief. Ce, alors que le général Berhanu Jula, chef d'état-major de l'armée fédérale, avait assuré au début de l'offensive que "la guerre ne gagnerait pas le centre du pays" et "se terminerait" au Tigré. En outre, même si le TPLF assure que "le conflit ne concerne pas les civils amhara", de vieux différends territoriaux opposent les Amharas, deuxième groupe ethnique du pays, et les Tigréens. Et des milliers de miliciens amhara ont déjà rejoint le Tigré pour appuyer l'armée fédérale éthiopienne. D'où les craintes croissantes de nombreux observateurs que ce conflit entraîne l'Ethiopie, deuxième pays le plus peuplé d'Afrique (100 millions d'habitants) et mosaïque de peuples, dans une guerre communautaire incontrôlable, mais déstabilise aussi toute la région de la Corne de l'Afrique. L. M./Agences