Jamais sans doute depuis l'ouverture au pluralisme politique en 1989, les partis d'opposition n'ont subi une telle entreprise d'exclusion et de harcèlement en tous genres. Temps durs pour l'opposition ou du moins pour nombre de voix impliquées dans le Hirak et qui ne s'inscrivent pas dans l'agenda du pouvoir : il y a quelques années, elle était encore "tolérée", même si c'était le temps d'une campagne, mais désormais, elle se voit réduite à activer de façon presque semi-clandestine. Et de nombreux partis catalogués dans cette catégorie l'apprennent à leurs dépens. Lorsqu'ils échappent à un mouvement de redressement, souvent fomenté, ils doivent composer avec les entraves bureaucratiques ou faire face à l'oukase. Dernier en date, l'Union pour le changement et le progrès de Me Zoubida Assoul. Jeudi, il s'est vu ordonner par le ministère de l'Intérieur de se conformer à la loi sous peine de poursuites judiciaires. Les services du ministère de l'Intérieur ont enregistré la "situation illégale du parti UCP, dont les activités ne sont pas conformes à la législation en vigueur, notamment la loi organique 12-04 relative aux partis politiques", a écrit dans un communiqué le département de Beldjoud. Sans préciser les griefs retenus contre sa présidente, sans références comme le prévoit la loi en pareille circonstance, le ministère de l'Intérieur brandit, en termes à peine voilés, la menace de dissolution. Zoubida Assoul est ainsi appelée à "l'impératif d'assumer l'entière responsabilité des retombées de la situation illégale actuelle et de ces agissements". Début du mois, c'est la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, qui a été la cible d'une tentative de putsch avorté de la part de certains militants exclus du parti. Et depuis quelques mois, le RCD est cible d'une opération politico-médiatique. Alors qu'il est empêché de tenir son conseil national, sous prétexte de crise sanitaire, son président Mohcine Belabbas a été visé par des poursuites judiciaires après la levée de son immunité parlementaire. Parallèlement, il a dû faire face à une campagne de dénigrement de la part de certains médias, sans compter les harcèlements subis par certains de ses élus. C'est au terme d'une grande bataille judiciaire que le FFS a dû récupérer son siège, tandis que certains de ses élus ont maille à partir avec la justice. Le MDS aussi est logé à la même enseigne. Ces pressions multiformes que subit l'opposition et qui vont en s'intensifiant à mesure qu'approche l'échéance électorale contrastent singulièrement avec la bienveillance, y compris au sein des médias, dont bénéficient certains partis à l'image du RND et du FLN que la Hirak populaire a pourtant disqualifiés. S'il est clair que son rejet du scrutin et sa proximité avec le mouvement populaire peuvent expliquer ces pressions, rien ne justifie au demeurant d'empêcher des partis légaux – que seuls les citoyens peuvent sanctionner au demeurant et à qui appartient le libre choix du cadre de l'exercice politique qu'ils veulent s'offrir – d'exercer le droit que leur accorde la loi fondamentale. Tout se passe comme si, au-delà de la "punition", il y avait une volonté de recomposition au forceps du champ politique. Un pari hasardeux. "Le PAD alerte l'opinion publique sur de telles dérives contre le multipartisme et qui visent à pousser les citoyens aux extrêmes. Il condamne de telles pratiques et dénonce l'instrumentalisation des institutions de l'Etat pour bâillonner les Algériennes et les Algériens", a réagi hier le regroupement dont, curieusement, tous les membres sont dans le viseur des autorités.