■ "Istiqlal !" (Indépendance !) Le vocable syllabique chargé d'une forte émotion est scandé par des centaines d'Algériens établis au Canada qui ont de nouveau battu le pavé dimanche à Montréal pour marquer le 59e anniversaire de l'indépendance nationale. La manifestation a pris un caractère festif avec le passage en zone verte de la région de Montréal, impliquant la levée de certaines restrictions sanitaires. Dimanche, dans la matinée, les manifestants ont envahi bruyamment la place du Canada, désormais habitée par l'esprit du Hirak. Vers midi, les premiers carrés se mettent en branle et aussitôt les slogans habituels de l'insurrection citoyenne de Février 2019 se font entendre dans le ciel montréalais. Si la dernière marche pacifique du 12 juin a été organisée pour dénoncer le scrutin législatif massivement boudé par les électeurs, la manifestation de ce dimanche a mis l'accent sur l'arbitraire des détenus qui croupissent en prison. "L'Algérie, une prison à ciel ouvert", dénonce une pancarte brandie par une manifestante. "Pour une Algérie libre, démocratique et sociale", réclame une autre. "Si des Algériens sont mis au cachot pour leurs opinions et leurs idées, c'est la preuve que le peuple algérien n'est pas libre 59 ans après l'indépendance nationale", déplore un manifestant, enseignant de son état, analysant la répression du mouvement citoyen comme l'expression d'une impasse nationale. "Le recours à la répression d'un mouvement revendicatif pacifique ne fera qu'aggraver la situation qui va inéluctablement exploser", prévient-il. "Libérez les détenus d'opinion", peut-on lire sur une banderole déployée en tête d'un carré de marcheurs. Une autre banderole arbore les portraits des détenus, ce qui a suscité la curiosité des passants pressés de fixer cet instantané par leurs téléphones intelligents. Alors que la manifestation aux couleurs bariolées poursuit son itinéraire sur la rue Peel avant de bifurquer par la rue Sherbrooke, l'essentiel de la littérature contestataire du Hirak est scandé à pleins poumons. Devant le siège du consulat algérien, point de chute de la marche, la tension est montée d'un cran, même si l'administration consulaire est fermée le dimanche. Des prises de parole ont été improvisées sur place pour réitérer l'engagement de la diaspora algérienne de continuer le combat pacifique pour le changement démocratique. "Le Hirak continue jusqu'à la réappropriation de notre indépendance confisquée", tel est d'ailleurs le mot d'ordre de l'appel à la marche diffusé sur les réseaux sociaux. Après l'hymne national, les manifestants se sont dispersés dans le calme, alors que les policiers qui les ont accompagnés dès le début de la marche régulent la circulation déviée de l'itinéraire de la manifestation.