Résumé : Latéfa est choquée. La malade est mère de plusieurs enfants, l'aîné travaille occasionnellement pour les aider. Ce qu'elle raconte donne froid dans le dos. Son mari la battait et le fait de la savoir malade ne l'a pas adouci envers elle. Avant, elle l'aidait en travaillant chez des gens fortunés. Dr S, peinée pour elle, craint pour sa vie. Elle veut l'accompagner chez le médecin légiste et l'encourage à porter plainte, la malade refuse. Si elle le fait, elle se mettra en danger. À sa sortie de prison, elle sera une victime de plus. -Chaque mois, on apprend qu'une femme a été retrouvée morte... massacrée ou égorgée parce qu'ils ne s'entendent plus... Parce qu'ils manquent de tout. Combien de femmes mortes ces dernières années ? Tous âges confondus...L'une tombe dans un puit, l'une est électrocutée, une autre fait une overdose de médicaments... Et il y a celle retrouvée dans un puit, soi-disant qu'elle était tombée par accident ! Qui dit qu'on ne l'avait pas poussée ? L'oncologue s'est tournée vers la malade qui vient de parler. -Tous les crimes demeurent impunis ! On ne retrouve jamais les assassins et les rares fois où c'est le cas, ils sont vite relâchés ! Leur condamnation est pour quelques mois et parfois, ils ont des sursis ! Non, ma sœur, ne porte pas plainte après ton mari ! C'est le père de tes enfants ! Ils grandiront et te protègeront ! Dr S n'en revient pas. -Comment pouvez-vous l'encourager à attendre de l'aide de ses enfants ? Elle est en danger ! En plus de combattre la maladie, elle doit se protéger des coups ! Vous voyez son œil ! Si elle n'est pas soignée, elle risque de perdre la vue ! Vous voyez son cou ? Elle risque de mourir la prochaine fois ! N'encouragez pas les femmes à subir la violence ! -Si elle porte plainte et que la police ne le trouve pas à la maison, elle vivra sur le qui-vive à surveiller ses arrières ! Ce n'est pas une vie ! -Si leurs familles ne peuvent pas l'aider, la police pourra le faire ! Si vous habitez un douar, la gendarmerie lui rendra visite, dit-elle à la malade qui remet son foulard en place. Je vous en prie, écoutez-moi ! -Docteur, je suis venue pour faire mon injection pas pour avoir des conseils ! C'est vrai qu'il m'a tapée fort, mais Allah ghaleb, je n'ai pas de chance ! Est-ce que vous allez me faire mon injection ? -Je devais voir vos résultats avant ! Je ne peux pas... et dans votre état... Venez, allons voir le médecin des urgences. Je parlerais aux policiers. Peut-être qu'ils seront meilleurs conseillers que moi ? -Je préfère repartir sans que je ne le regrette ! Je veux rentrer avant lui ! Est-ce que vous pouvez me donner un autre rendez-vous ? Latéfa est bouleversée par ce qu'elle a vu et entendu. Alors que la malade finit de nouer son foulard, les manches de son hidjab ont glissé et laissent apparaître les bleus de ses avant-bras. Dr S est dépassée par la situation. Les examens ne se font pas au niveau de l'hôpital. Elle lui prépare de nouvelles ordonnances. La femme baisse une partie de son foulard et part la tête baissée après les avoir mis dans un vieux sac. Latéfa intervient. -Dr, je ne peux pas bouger, mais je voudrais l'aider, dit-elle à l'oncologue. Retenez-la ! -Elle refuse d'écouter... Latéfa sort son portable, appelle son père et lui demande de retenir la dame qui sortait. Elle la lui décrit et le prie de l'aider. -Que veux-tu au juste ? -Elle est dans le besoin ! Elle est venue sans les bilans ! Elle n'a pas pu être soignée aujourd'hui ! Elle doit rentrer rapidement chez elle ! Elle a peur de son mari... Fais quelque chose pour elle ! Aide-la ! -T'inquiète ! Je m'en occupe. -Elle est sortie ? -Oui ! Je te rappelle plus tard. Ne te fais pas de souci pour elle ! Si tu as tes écouteurs, mets une musique douce ou écoute le Coran ! Cela t'aidera à te détendre. -D'accord ! Mais appelle-moi dès que tu lui auras parlé. Da Ali le lui promet. Après avoir raccroché, elle suit ses conseils et met un peu de musique douce. Mais elle ne cesse de penser à cette femme qui, en plus d'être malade vit avec ses enfants dans la misère. Ces derniers doivent paniquer, en ne la trouvant pas à la maison. À force de la voir prendre des coups, ils penseront au pire. Latéfa espère que ses parents trouveront comment l'aider. Dans cette salle de soins où le destin a réuni toutes ces femmes par la maladie, comparée à elles, elle s'estime chanceuse. Il ne lui reste qu'à prier pour sa guérison. Non, rectifie-t-elle en son cœur, inchallah qu'elles guériront toutes ! Elle ne s'en rend pas compte mais elle pleure.
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