Il y a un an nous quittait à jamais, le 30 octobre 2004, à l'âge de 80 ans, Mohand ou Idir Aït Amrane, l'un des vaillants militants de la cause amazigh aux côtés de bien d'autres tels que Mouloud Mammeri et Kateb Yacine. Militant de talent et nationaliste d'une rare clairvoyance, il a laissé derrière lui des souvenirs tels qu'ils doivent faire objet d'une recherche pour les générations nouvelles. Né le 22 mars 1924, au village Thikidount, dans la contrée des Ouacifs en Haute-Kabylie Da Idir a vécu sa jeunesse à Tiaret où il côtoya les premiers bancs de l'école à Sougueur avant de rejoindre le lycée de Mascara pour ses études secondaires qu'il poursuivra au lycée de Ben Aknoun à Alger durant les années 1940. Il entama, durant la même période, sa carrière militante pour la culture et la langue amazigh. Et alors qu'il faisait partie du fameux groupe du lycée de Ben Aknoun composé de Hocine Aït Ahmed, Omar Oussedik, Benai Ouali, Amar Ould Hamouda et Chibane Saïd, il se consacra à l'écriture d'un éventail de textes engagés pour la cause amazigh dont “Ekker Ammis Umazigh” (Réveille-toi fils d'Amazigh), écrit en 1945 et repris en chœur par tous les militants défendant les mêmes principes identitaires. Conjuguant son activisme identitaire à la politique, il s'engagea aussitôt dans les rangs du Parti du peuple algérien (PPA), au sein d'une cellule chapeautée par Mbarek Fillali, avant de se faire arrêter au lendemain du déclenchement de la lutte armée par l'administration coloniale qui l'emprisonna à Tiaret jusqu'à l'indépendance de l'Algérie. En septembre 1962, Da Idir sera élu député à la première assemblée constituante de l'Algérie indépendante avant d'assurer le poste d'inspecteur d'académie à travers plusieurs wilayas du pays et celui de wali à El- Asnam (Chlef) et Mostaganem. Cependant, loin de se détacher du cordon ombilical de son identité, Da Idir a été pour beaucoup dans l'introduction de tamazight dans le système éducatif en présidant aux destinées du Haut-Commissariat à l'amazighité (HCA), installé en 1995, au lendemain de la grève du cartable de 1994. “Je suis natif d'un canton écarté de la haute montagne, issu d'une vieille race qui, depuis des millénaires, n'a pas cessé d'être là, avec les uns et les autres... qui, sous le soleil ou la neige, à travers les sables ou les vieilles cités du tell, a déroulé sa saga, ses épreuves et ses fastes, qui a contribué dans l'histoire de diverses façons à rendre plus humaine la vie des hommes”, nous disait, un jour de l'année 1991, le géniteur de “Ekker ammis umazigh” pour reprendre une expression de feu Da L'Mulud. Ainsi, le hasard a voulu qu'il s'éteigne un samedi 30 octobre 2004 sur un lit de l'hôpital militaire d'Oran, emporté par une longue maladie qui l'avait ravi aux siens et à l'Algérie qu'il avait toujours portée dans son cœur. R. SALEM