Statistiques erronées, défaillances dans le système de contrôle périodique, blocages bureaucratiques et des décisions intempestives. Ce sont là les principaux griefs retenus par la mission d'information parlementaire contre le ministère du Commerce, à propos de la pénurie de l'huile de table. C'est un sévère réquisitoire contre le ministère du Commerce. La mission d'information parlementaire sur la pénurie de l'huile de table a accusé ce département ministériel de fournir des "statistiques erronées ce qui a n'a pas manqué d'aggraver la pénurie" et d'avoir pris des mesures "intempestives comme celle d'interdire aux commerçants de vendre au moins de 18 ans". Présenté hier au siège de l'Assemblée nationale par le président de cette mission, Smaïl Kouadria a, en partie, chargé le ministère du Commerce. Le rapport pointe du doigt les services du département de Kamel Rezig en évoquant des "défaillances dans leur système de contrôle périodique", outre le fait qu'ils ont produit des "statistiques ne reflétant pas la réalité", ce qui a "amplifié" la pénurie. "Dépassés", ajoute le rapport, les services du ministère du Commerce ont pris des "décisions improvisées" face à la crise, "en interdisant, par exemple, la vente de l'huile de table aux individus âgés de moins de dix-huit ans". L'autre cause de la pénurie constatée a été le "refus" d'acheter l'huile de table. La raison ? La commission rapporte en effet, que les distributeurs estiment que la marge bénéficiaire établie sur un bidon d'huile est "insuffisante" : elle ne les incite pas à s'en approvisionner. Par ailleurs, la facture imposée par le gouvernement pour assurer la "traçabilité" du produit et imprimer de la "transparence" aux circuits de distribution fait partie des causes ayant poussé les "détaillants" à ne pas vendre l'huile de table. La commission a, en outre, pointé la "spéculation". Elle a ainsi mis en relief le fait que les "distributeurs agréés auprès des producteurs sont approvisionnés de manière régulière, en huile de table, alors que grossistes et détaillants ne le sont pas". Ce faisant, "les producteurs créent la pénurie", explique la commission. Celle-ci relève également qu'un "producteur lui a déclaré que toute la production journalière (fraîchement sortie d'usine) est mise immédiatement dans les circuits de distribution". "Mais vérification faite (le 11 janvier dernier), il est apparu que l'opérateur dont il est question disposait d'un stock de production qui remonte au 31 décembre 2021". La commission a, dans un autre chapitre, évoqué le fait que "certains producteurs ont refusé d'augmenter la production sous prétexte que l'Etat ne leur a pas versé les subventions" auxquelles ont droit en matière de production : l'Etat prend en fait en charge le différentiel entre le prix auquel est produite l'huile et le prix auquel, elle est vendue. Selon des chiffres fournis par la commission, six unités de production totalisent une production estimée à "4 330 tonnes par jour". La commission ne précise cependant pas si ce volume de production couvre les besoins en huile de table du pays. Il est à rappeler qu'une loi portant lutte contre la spéculation illicite a été adoptée en décembre 2021. Elle prévoit des peines privatives de liberté et des amendes selon une échelle graduelle logique ascendante des peines. Si le délit concerne des produits de base comme les céréales et leurs dérivés, le lait, l'huile, le sucre et les légumineuses, la peine peut aller jusqu'à 20 ans de prison assortie d'une amende de 10 millions de dinars. Cette peine pourrait être portée jusqu'à 30 ans de prison avec une amende de 20 millions de dinars au cas où ce crime serait commis dans des circonstances exceptionnelles ou en cas de propagation d'une épidémie ou d'une catastrophe. Cette peine pourrait être portée à la réclusion à perpétuité, si le crime est commis par un groupe criminel organisé. La loi prévoit également la confiscation du local où le délit a eu lieu ainsi que les moyens utilisés et les fonds encaissés, avec la radiation du registre du commerce, l'interdiction d'exercer des activités commerciales, la fermeture du local avec interdiction de son exploitation pendant une année au maximum. La commission d'information parlementaire a formulé une série de propositions et des solutions durables. La commission semble avoir mesuré l'ampleur de la crise et le degré de mécontentement des citoyens dont le pouvoir d'achat s'est érodé, ces dernières années, sous l'effet de la crise économique de manière générale. Les ménages assistent, impuissants, à des pénuries d'huile de table, voire à d'autres produits de large consommation. La commission déplore l'absence d'instruments de régulation du marché. Aussi, elle estime nécessaire de mettre en place une agence de sécurité alimentaire qui aura, entre autres objectifs, de réguler le marché. Elle recommande également de prendre des mesures devant permettre aux agents de contrôle, relevant du ministère du Commerce, d'accomplir leur tâche avec toute l'efficacité requise, ce qui devrait permettre d'éviter les erreurs dans leur action de contrôle. Selon son président, Smaïl Kouadria, la commission d'information parlementaire, a recueilli les avis de tous les acteurs du marché pour pouvoir établir les responsabilités et trouver les causes qui ont conduit à cette pénurie : producteurs, grossistes, distributeurs et détaillants. Elle a effectué une série de visites dans les wilayas de Mascara, d'Oran, d'Oum El-Bouaghi, de Sétif, de Béjaïa, d'Adrar et de Bord Badji-Mokhtar.